#AGREMENT

Capacité des associations à agir en justice : la question de l'agrément

Capacité des associations à agir en justice : la question de l'agrément

La capacité des associations à agir en justice pour la défense d’intérêts collectifs est soumise à des conditions de recevabilité variables selon les juges saisis et les sujets concernés. Tandis que devant les juges civil et administratif, la recevabilité de l’action repose sur l’appréciation de l’intérêt à agir, devant le juge pénal prévaut le principe selon lequel la capacité à enclencher l’action publique pour la répression des infractions est limitée et réservée au procureur de la République et aux victimes de l’infraction dénoncée. Ce principe connaît néanmoins désormais de multiples exceptions, instituées par le législateur et marquées par une grande hétérogénéité. Certaines associations ne pourront ainsi agir que par voie d’exception, après avoir reçu l’accord de la victime ou à condition d’avoir préalablement obtenu un agrément.

Anticor est l’une des associations françaises à bénéficier d’un tel agrément, l’autorisant à agir en justice dans des affaires de corruption présumée, et notamment en cas d’inaction du parquet. L’association avait sollicité en 2020, le renouvellement pour trois ans de l’agrément ministériel, lui permettant d’exercer les droits de la partie civile dans les affaires de corruption. Cependant, l’association ayant porté plainte contre le ministre de la justice pour “prise illégale d’intérêts” dans une autre affaire, le garde des Sceaux s’est retrouvé dans l’incapacité de prendre une décision de renouvellement, sans risquer le conflit d'intérêts. Avec décret du 23 octobre 2020, le garde des Sceaux a été déchargé, au profit du Premier ministre, de tout pouvoir décisionnaire dans les affaires relatives à des personnes ayant engagé des actions notamment judiciaires contre lui en sa qualité de ministre ou d'avocat.

Cependant, ce transfert de compétences du ministère de la Justice au Premier ministre dans le dossier Anticor, n'apporte pas la garantie que l’association sera traitée de manière impartiale par le Gouvernement et met l'exécutif dans une situation délicate pour poursuivre dans un sens ou dans un autre l'instruction d'un tel dossier.

Pour sortir de cet écueil d’un possible conflit d’intérêts, l’Observatoire de l’éthique publique, dont je suis membre, avait proposé de sortir l’agrément des mains de l’exécutif, pour le confier à une autorité indépendante. Je porterai cette proposition dans le cadre de mes travaux au sein de la mission flash relative à la "capacité des associations à agir en justice".

Des auditions qui ont d'ores et déjà été menées, il ressort que les associations en capacité d'agir en justice sont appréciées par les autorités juridictionnelles. Elles apportent des connaissances pointues dans certains domaines. Elle sont un complément indispensable, permettant au surplus, à la société civile de s'exprimer. Cela est vrai en matière de lutte contre la corruption, dans le domaine de l'environnement et dans la lutte contre les discriminations. 

A lire aussi