Adoption des propositions de loi relative à la modernisation des règles applicables à l’élection présidentielle

Adoption des propositions de loi relative à la modernisation des règles applicables à l’élection présidentielle
 
Les deux propositions de loi ont été adoptées en nouvelle lecture par l’Assemblée nationale le 24 mars 2016.
Les propositions de loi visent à moderniser les règles applicables à l’élection présidentielle dans cinq grands domaines :
  • les parrainages. Le texte actualise la liste des élus habilités à présenter un candidat pour tenir compte des modifications apportées par la réforme territoriale (ajout des présidents des métropoles par exemple). Il précise également que les formulaires de présentation signés par les élus pour parrainer un candidat doivent être transmis au Conseil constitutionnel par l’élu signataire. La publicité des auteurs de présentations des candidats sera intégrale (et non plus seulement 500 parrainages tirés au sort par le Conseil constitutionnel). Le Sénat a prévu la publicité intégrale y compris pour les présentateurs de candidats qui n’auront pas recueilli les 500 signatures.
  • la campagne électorale audiovisuelle. La proposition de loi remplace, pendant la période qui s’étend de la date de publication au Journal officiel de la liste des candidats à la veille de l’ouverture de la campagne officielle, la règle d’égalité des temps de parole par un principe d’équité en fonction de la représentativité des candidats et de la contribution de chacun à l’animation du débat électoral. Cette disposition a été supprimée par le Sénat en première lecture.
  • les comptes de campagne. La proposition de loi tend à réduire à six mois, au lieu d’un an, la période pendant laquelle les candidats à l’élection présidentielle doivent faire figurer dans leur compte de campagne leurs recettes et leurs dépenses électorales. En corollaire, les moyens de contrôle de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) seront renforcés en lui permettant de recourir à des experts.
  • les opérations de vote. Le texte prévoit la clôture du scrutin à 19 heures avec de possibles dérogations locales jusqu’à 20 heures (le Sénat a supprimé toutes les dérogations en première lecture). Il aggrave les sanctions pénales qui répriment la divulgation de résultats de l’élection avant la fermeture du dernier bureau de vote. Par ailleurs, les commissions de contrôle des opérations de vote prévues dans les communes de plus de 20 000 habitants sont supprimées au motif qu’elles font double emploi avec les délégués du Conseil constitutionnel.
  • les règles applicables aux Français de l’étranger. Il est mis fin à la possibilité de s’inscrire à la fois sur une liste électorale consulaire et sur une liste électorale dans une commune française.

 

Mon intervention lors de la séance publique du jeudi 24 mars 2016 
 
 
 
 

Monsieur le président,

Monsieur le Garde des Sceaux, ministre de la justice,

Monsieur le Président de la Commission des lois,

Madame la Rapporteure, Elisabeth Pochon,

Mes cher-e-s collègues,

 

Tout d’abord, comme je l’avais déjà exprimé en première lecture, je tiens à féliciter les parlementaires de l’Assemblée nationale qui sont à l’origine de ces deux propositions de loi,  preuve du dynamisme de l’Assemblée nationale qui prend en main la réforme de questions importantes. Et, si ces textes  paraissent éloignés des préoccupations des français, n’oublions pas que c’est de la Constitution et de l’efficacité du système électoral que dépend la légitimité démocratique de tout le droit de notre pays. Je tiens à remercier aussi  Madame la rapporteure.

Derrière ces deux propositions de loi, organique et ordinaire, se profile une modernisation du régime électoral entourant l’élection du Président de la République et  de quelques  règles essentielles concernant les élections en général. Certaines dispositions étaient réclamées de longue date par certains élus, le Conseil constitutionnel et de nombreux constitutionnalistes français, mais aussi par la Commission nationale des comptes de campagne, le Conseil supérieur de l’audiovisuel, entre autres. 

Il ne s’agit pas bien sûr de satisfaire aux demandes de ces autorités, comme l’avait rappelé hier M. Lagarde, mais d’entendre, avec notre liberté de législateur et d’apprécier l’utilité d’aller ou non dans le sens de recommandations ainsi faites .

Les propositions de ces deux textes,  s’inscrivent pleinement dans la politique de transparence publique menée par la majorité socialiste depuis l’année 2012. Elles marquent la recherche constante d’un véritable équilibre entre une meilleure représentation politique et le maintien de l’efficacité de l’action publique.

Il en est ainsi de la publication de tous les parrainages qui  constitue une réelle innovation sous la Ve république et garantit, pour les électeurs, la transparence de la vie publique. Le choix des élus-parrains s’effectue sous le regard attentif des citoyennes et citoyens qui sont, dans une démocratie digne de ce nom, les véritables juges de l’action politique. Cette évolution permet de responsabiliser tous les acteurs en soumettant au regard du public, leur choix. Elle permet aussi de respecter le principe d’égalité entre les parrains, lesquels seront désormais tous connus. Il est mis fin à l’opacité  d’un  autre âge, entourant les parrainages comme leur nombre rapporté à chacun des candidats ;

Il est de bonne politique de prévoir dans le texte une transmission directe  des parrainages par les élus au Conseil constitutionnel. L’élu remplira en responsabilité le formulaire ad hoc et  le candidat ou la candidate se verront libérés d’une tâche matérielle qui n’est pas la plus valorisante de la procédure. 

La substitution du principe d’égalité par celui d’équité au cours de la période dite intermédiaire qui court de la publication de la liste des candidats à la veille de la campagne officielle  était réclamée de longue date par le CSA. Nous savons tous que cette recommandation ne peut suffire à légitimer cette disposition, laquelle, au demeurant, fait l’objet de critiques auxquelles je n’ai pas été insensible à titre personnel.

Mais, en fin de compte, la stricte égalité ne permet pas toujours de coller à une réalité importante dont les médias devraient rendre compte et qu’il est essentiel que les services de télévision relatent une actualité qui intéresse au premier chef nos concitoyens. Il importe de donner du dynamisme à une campagne électorale et d’attirer les citoyens et les citoyennes. Le temps égalitaire partagé à des heures d’écoute très différentes ne valorise pas, contrairement à ce qu’ils redoutent,  les candidats moins connus.

L’équité maintient l’exigence que chaque parti dispose d’un temps d’antenne minimum, et d’une autre part d’antenne en fonction de sa capacité à mobiliser et à faire vivre de nouvelles idées. Il nous faudra veiller à ce que cette équité favorise le pluralisme et ne porte pas atteinte à un principe d’égalité auquel il n’est pas question de déroger dès que la campagne électorale aura commencé.

Des analyses faites sur cette période intermédiaire, il ressort que l’application du droit actuel s’avère contreproductive pour les candidats et préjudiciable au pluralisme des opinions. La stricte application de l’égalité aboutit à une frilosité des médias et à une réduction du temps de parole. Ce temps de parole serait en baisse continue depuis 2007, à raison de critères trop rigides.

Le CSA devra veiller au respect de ce  traitement équitable, les  citoyens, les candidats y veilleront aussi, en tenant compte de critères de représentativité et de  la contribution  de chaque candidat et candidate à  l’animation du débat électoral. Ces critères ne sortent pas d’une simple analyse, mais ont été validés par le Conseil d’Etat, pour cette période préliminaire. Nous ne sommes pas dans une modernisation sans garantie. Le débat politique est attendu et cette mesure très limitée dans le temps, doit permettre de le dynamiser, ce qui favorisa tous les candidats et le pluralisme des opinions auquel nous sommes tous attachés.

Enfin, nous revenons pour l’essentiel au texte issu de la première lecture à l’Assemblée nationale. Il en est ainsi de la fermeture des bureaux de vote pour les seules élections présidentielles à  19 et 20 heures pour mettre un terme aux divulgations anticipées des résultats; il en est ainsi de la réduction à six mois de la période de prise en considération des comptes de campagne pour toutes les élections hormis les élections présidentielles. Nous avons adopté en commission des lois, à l’unanimité,  un amendement défendu par M. Lagarde, au nom de l’UDI, amendement proche de celui que nous avions nous-même déposé et c’est très bien ainsi. Nous vous proposerons au nom du groupe SRC, un nouvel amendement permettant de distraire de l’article L.52-4 du code électoral, la période concernant les élections présidentielles, lesquelles doivent rester fixées à  un an. A ce propos, je tiens à préciser pour avoir entendu des propos contraires, qu’il n’y a jamais invalidation de l’élection d’un président de la République s’il y a  rejet des comptes de campagne, mais une sanction financière dont nous avons eu l’exemple il y a peu.

Ces dispositions sont consensuelles.

L’article 2 Ter de la loi ordinaire a été  introduit et adopté  à l’unanimité par le Sénat. Cet article vient modifier substantiellement la loi du 19 juillet 1977 relative à la publication et à la diffusion de certains sondages portant sur des sujets liés, de manière directe ou indirecte, au débat électoral. Malgré mes réserves et celles de la rapporteure, tenant à un texte de loi à part entière et non examiné dans le détail, depuis 2011,  la Commission des lois de l’Assemblée nationale a voté conforme hier ce nouvel et long article de plus de 4 pages. Il s’agit finalement par ce texte, d’ajouter de la transparence et des contraintes s’attachant à la publication ou la diffusion de ces sondages, objet de questions récurrentes en période électorale.

Tels sont les commentaires qu’appellent de ma part ces deux textes ; il faut en saluer l’adaptation et la modernisation comme l’exigence de transparence. Nos débats en témoigneront.

A lire aussi