Grand débat : mon intervention lors du débat sur la démocratie et la citoyenneté

Grand débat : mon intervention lors du débat sur la démocratie et la citoyenneté

 

« C’est par la démultiplication des formes d’expression des citoyens que l’on répondra à la crise de la représentation » affirmait Pierre Rosanvallon. Le grand débat est l’une de ces formes d’expression, ayant permis aux citoyens de faire émerger certains sujets, dont les parlementaires doivent aujourd’hui s’emparer. Car la démocratie, ce n’est pas les élus contre les citoyens, mais les élus avec les citoyens.

Nous n’avons pas attendu le grand débat pour nous soucier de renforcer la participation des citoyens à la vie publique.

1) Dans un contexte de méfiance généralisée à l’égard des élus, la loi sur le non-cumul des mandats a clarifié le rôle du député en lui permettant d’être pleinement engagé et investi dans ses responsabilités. Le non-cumul est aujourd’hui plébiscité par les députés ; mais nous devons aller plus loin dans le champ de la lisibilité, et de la moralisation de la vie publique, tant au niveau local que national. Poursuivons l’objectif d’une République exemplaire.

2) Par ailleurs, nous avons fait plusieurs propositions, dans le cadre de la révision constitutionnelle. Je me réjouis de voir qu’elles répondaient aux attentes des gilets jaunes, et plus largement des citoyens.

a) Il me semble important que la Constitution précise que le député, en tant que représentant du peuple, doit favoriser l’expression citoyenne. Il nous appartient de favoriser cette expression, et de développer de nouveaux espaces démocratiques.

b) L’outil référendaire doit être perfectionné. Une réduction des seuils nécessaires à sa mise en œuvre est indispensable, afin de le rendre véritablement opérationnel. Le referendum d’initiative partagée, qui permet aux élus et aux citoyens de s’associer pour faire évoluer la législation, ne doit plus être illusoire, à une période où les demandes de participation citoyenne sont de plus en plus fortes.

c) Réhabiliter le droit de pétition, dont la portée est aujourd’hui considérablement réduite, et fait même injure à ces citoyens qui ont pris le temps de les déposer. Aucune pétition n’a été présentée en séance depuis 1986. L’inscription de ce droit dans la Constitution est primordiale, comme c’est d’ailleurs déjà le cas chez nombre de nos voisins européens.

La revivification du droit de pétition a d’ailleurs fait l’objet d’une réflexion attentive dans le cadre du groupe de travail sur la démocratie numérique que j’ai eu l’honneur de présider. Le Président de l’Assemblée Nationale, Richard Ferrand, dans une lettre aux parlementaires, s’est aussi montré favorable à cette évolution.

Il pourrait s’agir ainsi d’une pétition citoyenne soutenue par 1% des électeurs pouvant donner lieu à un débat au Parlement ; ou une proposition de loi citoyenne, donnant lieu, sous réserve de sa recevabilité, à son inscription à l’agenda de l’Assemblée. 

Tout cela mérite un examen approfondi et, à mon sens, la mise en place d’un groupe de travail Trans partisan. Comme le dit le sociologue Jean-Pierre Le Goff, « les problèmes ne se résoudront pas par la magie du verbe », mais bien par des actions concrètes.

3) Mais le rôle du député est aussi local. Il importe que la Constitution le précise. La mise en place d’ateliers législatifs citoyens et de conseils citoyens dans ma conscription dès 2012 a été la traduction concrète de ma volonté de favoriser l’expression citoyenne. Tous les citoyens n’ont pas envie de débattre mais celui qui veut s’exprimer doit pouvoir trouver l’espace pour le faire. Et c’est notre rôle que de veiller à la garantie de cette expression.

C’est pourquoi, la réduction du nombre de députés me parait un mauvais signal, parce, d’une part il nourrit l’antiparlementarisme, et d’autre part, éloigne un élu, dont on réclame pourtant la proximité, dans le grand débat.

4) Dans le même esprit, la réorganisation territoriale de l’Etat doit se faire en complémentarité avec les parlementaires. Nous sommes en bonne voie avec certains décisions prises dernièrement, consistant à favoriser la présence du député, dans diverses commissions départementales (par exemple, DETR, et CDCI).  Il faut amplifier ce mouvement, sans voix délibérative du député, mais avec une présence lui permettant de jouer son rôle de proximité et d’explication des dispositifs législatifs si besoin.

Un autre exemple d’action concrète pourrait être le budget participatif concernant certaines dotations de l’Etat, faisant appel à des citoyens tirés au sort aux côtés des élus et des autorités administratives. Le secrétaire d’État Gabriel Attal et le ministre Blanquer semblent intéressés par cette proposition émanant de notre groupe de travail sur la démocratie numérique. Le tirage au sort ajoute de l’impartialité ajoute de l’impartialité à la décision prise, et a une vertu pédagogique sur le fonctionnement des institutions.

Pour conclure, samedi 30 mars, une grande manifestation sur le livre politique s’est tenue à l’Assemblée nationale. Les intervenants ont majoritairement tenu des propos très pessimistes, en faisant valoir la peur dans laquelle se trouve la société, au regard des défis majeurs que sont le réchauffement climatique, la biodiversité, le numérique, la mondialisation, et l’impuissance ressenti de l’Etat. Ces défis majeurs ne doivent pas nous paralyser, mais au contraire nous conforter dans la nécessaire adaptation de nos institutions aux demandes des citoyens du 21ème siècle.

Selon la philosophe Revault d’Allonnes, primée pour son œuvre lors de cette journée, « le risque inhérent à la démocratie » est d’être « nécessairement imparfaite et vouée à l’inachèvement ». Avec les citoyens, nous devons œuvrer à son perfectionnement.

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