CMP sur les textes "violences conjugales" et "engagement et proximité"

CMP sur les textes "violences conjugales" et "engagement et proximité"

Mon intervention au nom du Groupe "Socialistes et apparentés" sur la proposition de loi sur les violences intrafamiliales, après une Commission Mixte Paritaire conclusive.

Séance publique mercredi 11 décembre, 15 heures.

Monsieur le président,

Madame la ministre,

Monsieur le rapporteur,

Mes chers et chères collègues,

Je tiens tout d’abord à saluer l’initiative de cette proposition de loi qui a permis à l’Assemblée de discuter des questions soulevées lors du Grenelle contre les violences faites aux femmes et aboutir à l’issue du Grenelle à ce texte de loi. L’approche transpartisane qui a caractérisé l’examen de ce texte,  tient à la capacité de dialogue et d’écoute du rapporteur du Groupe Les Républicains, que je tiens ici à remercier.

I) A l’issue de la CMP, les dispositions initiales importantes ont été maintenues quasiment à l’identique, et nous nous en félicitons.

Le cœur de la proposition de loi qui vise à faciliter le recours à l’ordonnance de protection, à en faire un dispositif connu de tous et dissuasif, est essentiel. Il s’inspire de la politique efficace mise en place par des pays voisins comme l’Espagne qui est parvenue à protéger 30 000 femmes – alors que la France compte seulement 3 000 ordonnances de protection – et à faire baisser de manière significative le nombre de victimes de violences intrafamiliales.

La généralisation du bracelet électronique dans les procédures pénales tant au stade de la comparution immédiate, du contrôle judiciaire, que de la condamnation pour violences conjugales était attendue par la quasi-totalité des acteurs confrontés à ces situations aussi graves que complexes. C’est chose faite.

La précision apportée en ce que l’ordonnance de protection n’est pas nécessairement précédée d’un dépôt de plainte est bienvenue. C’est actuellement une démarche découragée au profit de la voie pénale.

Le maintien ou non de l’autorité parentale au conjoint violent trouve sa place dans un article émanant du sénat, lequel réécrit en CMPcomporte des paramètres prudents dans l’approche d’une question majeure qui a toute sa place dans le dispositif.

Deux regrets toutefois :

D’une part, l’acquisition et la détention d’armes sera interdite aux personnes à l’encontre desquelles une ordonnance de protection a été prononcée seulement si le JAF le décide, et non pas automatiquement.

D’autre part, l’article 1er B prévoyait que l’inscription au registre de main courante ne pouvait se substituer au dépôt de plainte en cas de violences conjugales ; or cette disposition n’a pas été retenue. Certes, l’argument selon lequel la main courante n’a aucune existence procédurale ne me parait pas coller à la réalité. Les mains courantes existent bien et les personnes victimes de violences conjugales en usent régulièrement en lieu et place d’une plainte.

II) Malgré l’utilité de ce texte, une réforme globale qui organise la lutte contre les violences intrafamiliales tant sur la prévention que sur la répression est toujours attendue et je ferai deux remarques de terrain, partant du constat dressé par les acteurs locaux et les victimes :

1- Le dépôt de plainte est douloureux et dangereux. Il est donc nécessaire de mettre en place un accompagnement des victimes que l'officier de police ou de gendarmerie n'est pas en capacité de mener, compte-tenu de sa charge de travail et des priorités multiples qui s'imposent à lui. Dans ce sens, les intervenants sociaux dédiés aux groupements de gendarmerie ont vocation à permettre une prise en charge immédiate face à des situations qui nécessitent du temps. Le Premier ministre a annoncé la création de quatre-vingt postes d'ici 2021.C’est très bien, mais Il apparaît cependant difficile d'attendre ce délai si l'on veut donner à la lutte contre les violences faites aux femmes toute son efficacité.

Par ailleurs, les conseils départementaux dont le champ de compétence obligatoire est de lutter contre la précarité sociale ont admis pour quelques-uns d’entre eux de  participer au financement de tels postes. Il serait utile que ce dispositif puisse être généralisé avec le soutien de l’Etat.

2- Enfin, le parcours judiciaire des victimes de violences conjugales est d’une complexité et d’un coût qui font que les victimes subissent la double peine. Ce que nous voulons éviter dans sa forme la plus grave, le meurtre, justifie que nous prenions sans délai des mesures à effet immédiat.

Au-delà du deuil à affronter, la famille se trouve démunie face à la procédure judiciaire et aux frais de justice importants qu'elle implique. Une information substantielle doit être délivrée par le service public de la justice par tous moyens. Par ailleurs, le montant de l’aide juridictionnelle est très faible et ne permet pas à la famille de la victime de recourir à l’avocat de son choix. Nous devons transformer ce dispositif en une avance forfaitaire recouvrable lorsque l’auteur du crime est solvable et faire en sorte que le service public de la justice veille à l’information globale des droits de chacun.

Ce texte constitue une avancée indéniable, nous le voterons et nous observerons tous ici et dans les territoires sa concrétisation. Dans un contexte où plus de 220 000 femmes sont victimes de violences conjugales chaque année, nous devons continuer nos efforts, et ajouter aux dispositions législatives, des mesures concrètes dont celles dont je viens de vous faire part et qui sont l’expression de l’attente des victimes en réelle souffrance.

Mon Groupe votera ce texte.

Cécile Untermaier

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