Ma réponse aux associations CCFD Terre Solidaire et ActionAid Peuples solidaires

Ma réponse aux associations CCFD Terre Solidaire et ActionAid Peuples solidaires

Les associations CCFD Terre Solidaire et ActionAid Peuples Solidaires m'ont interrogée sur divers points. Voici la réponse que je leur ai adressée cette semaine : 

Sur la justice fiscale :

La question de l’évasion fiscale ne peut être réglée efficacement qu’au niveau européen. Une réunion des ministres européens des Finances s’est tenue en début d’année sur ce thème à Bruxelles. Elle s’est conclue par un accord sur une liste noire de 17 pays non-coopératifs en matière fiscale.

Certes, la publication de cette liste représente un progrès dans la lutte contre les paradis fiscaux. Mais  l’Union européenne s’est arrêtée au milieu du gué. je regrette par exemple qu’aucune sanction ne soit prévue à l’égard des pays désignés comme non-coopératifs.

Par ailleurs, en excluant d’emblée la possibilité d’inscrire un Etat-membre sur sa liste noire, l’Union européenne s’interdit de régler le problème majeur des pratiques déloyales qui ont cours en son sein. La concurrence fiscale organisée par Malte, l’Irlande, le Luxembourg ou les Pays-Bas pénalise pourtant davantage nos économies que celle des Iles Samoa…

Pour porter un coup d’arrêt à l’évasion et l’optimisation fiscale, l’Union européenne doit rendre plus transparente et plus objective l’élaboration de sa liste noire et prévoir de réelles sanctions contre les Etats ne jouant pas le jeu de la coopération fiscale.

Nous sommes nombreux à vouloir une loi efficace nous permettant de lutter contre la fraude et l’évasion fiscale. C’est en ce sens que nous avions proposé un dispositif de reporting transparent pays  par pays du chiffre d’affaires des entreprises. Mais, le Conseil constitutionnel a censuré une telle mesure en faisant valoir le droit fondamental de la libre entreprise.Pourtant, les exigences constitutionnelles ou d’intérêt général, comme l’égalité devant l’impôt, justifient des limitations à la liberté d’entreprendre ou au droit de propriété.

Nous allons déposer un amendement en ce sens dans le cadre de la révision constitutionnelle qui sera discutée en Commission des lois. Je ne me fais aucune illusion sur la suite réservée à cette proposition. Mais nous persévérons dans la voie d'un comportement éthique indispensable de la part des élus et des acteurs économiques.

 Sur l’agro-écologie :

Lors des débats dans l’hémicycle sur le projet de loi agricole, notre ligne politique s’est articulée autour de deux axes principaux : la juste rémunération des producteurs et la qualité alimentaire pour tous.

Nous avions déjà initié ce combat au cours du précédent quinquennat avec la loi d’avenir pour l’agriculture de Stéphane Le Foll et la loi Sapin II qui avait jeté les bases d’un rééquilibrage des prix au profit des producteurs avec la mise en place de la transparence sur le prix de revient.

Nous avons défendu plusieurs propositions :

Des contrats pluriannuels et tripartites entre les producteurs, les transformateurs et les distributeurs : si on veut un véritable rééquilibrage au profit des producteurs, il est indispensable que les 3 acteurs s’engagent pour mieux répartir les marges et valoriser les productions locales. Cet amendement de notre groupe a été voté.

Des sanctions effectives lors du non-respect des accords-cadres : les amendes (2 % du chiffre d’affaires) interviendront plus rapidement.

Anti-trust : nous défendons un assouplissement de la définition d’abus de dépendance économique. Concrètement, nous voulons empêcher les pressions parfois insupportables des centrales d’achat sur leurs fournisseurs.

Une stratégie nationale pour les grandes associations d’organisations de producteurs, avec le développement d’AOP, …

Des objectifs de qualité nutritionnelle pour l’ensemble de l’alimentation produite en France : faire monter en gamme l’alimentation française avec moins de sucre, de sel et de gras dans les aliments.

 Un encadrement de la publicité sur l’alimentation visant les enfants et une vraie éducation à l’alimentation.

La mise en place d’une police unifiée pour les contrôles sur l'alimentation, qui sera responsable du contrôle à la fois des producteurs, des distributeurs et des transformateurs (aujourd’hui, ce contrôle est fragmenté, ce qui en réduit l’efficacité)

La HVE (Haute Valeur Environnementale) comme le label de l’agro-écologie et une trajectoire sur 10 ans d’une intégration des objectifs de HVE niveau 3 dans le cahier des charges de tous les SIQO (Signe Officiel d'identification de la Qualité et de l’Origine)

L’interdiction d’importation et de vente de denrées alimentaires traitées avec des molécules interdites d’utilisation dans l’UE (ex : les cerises traitées au diméthoate)

Une demande de rapport sur les effets du Traité de Libre-échange UE-MERCOSUR sur l’économie, l’environnement, le climat et la santé

La création d’un fonds d’indemnisation aux victimes de produits phytopharmaceutiques

Des mesures d’urgence pour éviter les phénomènes d’accaparement des terres dans l’attente d’une loi sur le foncier agricole.

Nous avons voté contre la loi agriculture et alimentation au regard de son insuffisance en termes d'engagement sur la préservation de la diversité biologique,la protection du foncier et la transparence des marges et donc des prix agricoles, permettant ainsi à chaque consommateur de privilégier le produit qui protège le producteur. 

Sur la solidarité envers les migrants :

J’affirme et défends avec constance les propositions suivantes :

Non au placement en rétention administrative des enfants. La France est le pays de la liberté et des droits de l’Homme, elle ne peut devenir celui de l’enfermement des enfants. Cela signifie que les familles avec enfants doivent être assignées à résidence et non placées en centre de rétention. Cette pratique ne remet pas en question le retour dans leur pays d'origine des familles devant se soumettre à une décision de renvoi. 

Non à l’hypocrisie qui a pour objectif affiché de réduire les délais de traitement des dossiers, sans donner les moyens aux administrations concernées d’y parvenir tout en respectant notre droit et les délais de recours pour les demandeurs. Sur ce point, le Gouvernement a fermé la porte à tout engagement concret.

Oui à la suppression du délit de solidarité. Les Françaises et les Français ont, au gré de notre histoire, montré une grande générosité.

Oui à un accès organisé au marché du travail pour les demandeurs d’asile. Beaucoup de nos concitoyens ne comprennent pas que les demandeurs d’asile soient privés de cette possibilité, alors que nombre d’entre eux disposent de compétences acquises dans leur pays et qui leur permettent d’être immédiatement employables et autonomes.

Oui au maintien de l’effectivité du droit d’asile. Comme tous les droits inscrits dans notre Constitution, ce droit doit être respecté et ne peut subir aucune entrave.

Oui, à la définition d’un droit à la régularisation pour les « ni-ni », ces étrangers qui ne sont ni expulsables, ni régularisables comme les enfants majeurs d’une personne obtenant le statut de réfugié.

J'ajoute que l'Europe doit être au coeur de cette politique d'accueil. Si elle ne le fait pas, nous aurons partout le repli et des gouvernements tels que ceux que connaissent la Hongrie, l'Autriche, la Pologne.... et désormais l'Italie. Nous sommes en capacité de gérer convenablement, humainement cette situation qui n'a rien d'une submersion. Peut-être faut-il en passer par des quotas par pays, idée qui n'était pas la mienne au départ. 

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