Stratégie européenne de lutte contre le coronavirus

Stratégie européenne de lutte contre le coronavirus

I- Vers une « Union européenne de la santé »

La Commission européenne a fait le 11 novembre 2020 un certain nombre de propositions en faveur de la création d’une véritable « Union européenne de la santé » : possibilité de déclaration d’une urgence au niveau européen afin permettre à l’Union de prendre toutes les mesures nécessaires ; constitution d’une équipe européenne de soignants et professionnels de santé ; évaluation des risques épidémiologiques fondés sur des données communes ; création d’une nouvelle autorité chargée de la passation des marchés en matière biomédicale afin d’améliorer les tests et la recherche de contacts d’une part et de garantir l’approvisionnement en médicaments et équipements médicaux d’autre part ; plans d’urgence de préparation et de réaction contre l’épidémie harmonisés au niveau européen.

Ces actions n’auront cependant, pour l’essentiel, comme base juridique que l’article 168 §5 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) relatif aux menaces sanitaires transfrontalières. Cet article ne confère qu’un rôle d’appui à l’UE, c’est-à-dire qu’il ne lui donne ni des compétences partagées et encore moins des compétences exclusives. Un certain nombre de mesures seront néanmoins adoptées sous l’égide d’une autre base juridique relative au développement du marché intérieur, l’article 114 du TFUE.

L’ensemble des actions proposées sera mises en œuvre dans le cadre de 3 règlements européens distincts, par nature directement applicable en droit national. La Commission propose dans ce cadre un élargissement des mandats de deux de ses agences européennes aux situations de crise : l’Agence Européenne du Médicament et le Centre Européen de prévention et de contrôle des maladies. La Commission créera en outre une autorité biomédicale similaire à celle existant aux Etats-Unis, la « Biomedical Advanced Research and Development Authority (BARDA) ». Elle aura pour but de répondre aux risques et menaces sanitaires transfrontalières au niveau de l’UE.

II- La stratégie pharmaceutique européenne

Une « stratégie pharmaceutique européenne » a par ailleurs été présentée par la Commission européenne le 24 novembre 2020. Elle a pour objectif d’assurer un accès au niveau de l’Union à des médicaments de qualité et abordable quelles que soient les conditions, y compris en période d’urgence sanitaire. Cette stratégie couvrira tous les stades, de la recherche pharmaceutique à l’accès aux médicaments en passant par les procédures d’autorisation et de mise sur le marché. Elle a pour objectif notamment de sécuriser les approvisionnements de l’UE en médicaments et certains principes actifs qui dépendent actuellement largement d’Etats tiers. Elle se propose également d’intégrer les innovations technologiques telles que l’IA dans les nouvelles thérapies et de favoriser la compétitivité et le développement de l’industrie pharmaceutique.

III- La stratégie de vaccination de l’UE

La Commission européenne a adopté le 15 octobre 2020 une stratégie de vaccination coordonnée. La stratégie de vaccination de l’UE est basé sur deux piliers : la conclusion de contrats d’achat anticipés avec les entreprises pharmaceutiques et l’adaptation des règles à l’urgence actuelle afin d'accélérer la mise au point, l’autorisation et la mise à disposition de vaccins, dans le respect des normes de qualité, d'innocuité et d’efficacité applicables aux vaccins

1) Les contrats d’achat anticipés

L’UE a contracté au nom des Etats de l’UE des contrats d’achat anticipés de vaccins auprès des industriels et entreprises concernées. Cependant ce n’est pas la Commission européenne qui acquerra les vaccins mais bien les Etats membres qui par ailleurs garderont la maitrise de leur politique vaccinale. Les Etats membres agréent le fait qu’en acceptant ces contrats d’achats anticipés gérés par la Commission européenne, ils s’engagent à ne pas conclure de contrats d’achats anticipés identiques avec les mêmes entreprises et industriels.

Ces contrats d’achats anticipés peuvent contenir des clauses d’obligations d’achats de vaccins pour les Etats membres qui peuvent néanmoins souscrire à des clauses d’ « opt out ». Dans le cadre où la différence entre le financement initial de la Commission européen et le prix d’achat est difficile à évaluer, la Commission européenne s’acquittera d’une partie du coût lié à l’achat de vaccins dans la limite de 50% du coût total. Le financement initial européen sera considéré comme une avance de paiement pour tout achat de vaccins par un Etat membre, réduisant d’autant le prix payé par ce dernier pour acquérir le vaccin.

A ce stade, six contrats ont été conclus en vue de l’achat d’un vaccin, une fois que son innocuité et son efficacité auront été démontrées : AstraZeneca: 300 millions de doses; Sanofi: 300 millions de doses; Johnson & Johnson: 200 millions de doses, BioNtech / Pfizer pour 200 millions de doses, CureVac pour 225 millions de doses ; Moderna pour 160 millions de doses.

2) L’adaptation des règles à l’urgence

Dans sa communication du 15 octobre 2020 sur le déploiement du vaccin, la Commission encourage les Etats membres à mettre au plus vite en place une stratégie vaccinale. Elle met en avant le fait que le Etats doivent s’assurer qu’ils ont assez de personnels et de professionnels pour conduire cette stratégie vaccinale. Elle appelle les Etats membres à de nouveaux recrutements et au recours à des programmes de formation, incluant potentiellement les étudiants et les professionnels de santé à la retraite.

La Commission précise que les Etats doivent prévoir les infrastructures pour assurer les services vaccinaux, soulignant le fait que chacun des vaccins achetés ne nécessitera pas les mêmes caractéristiques de transport, de conservation et d’entreposage. Elle met en avant sur ce point qu’une solution logistique unique ne sera vraisemblablement pas suffisante pour assurer le déploiement sur le terrain de plusieurs types de vaccins différents. Les chaînes du froid et les capacités de stockage centralisé et déconcentrés devront être revues entièrement. Elle souligne que les Etats membres devront mettre en place aux fins de contrôle des stratégies vaccinales des systèmes électroniques d’information sur l’immunisation.

Enfin, la Commission préconise une stratégie vaccinale qui se concentrerait sur certaines catégories, sans ordre d'importance: les professionnels de la santé; les personnes âgées de plus de 60 ans; les personnes dont l'état de santé les expose particulièrement à des risques; les travailleurs essentiels en dehors du secteur de la santé; les personnes dans l’impossibilité de maintenir une distance physique; les groupes socio-économiques vulnérables et d'autres groupes à risque plus élevé.

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