[vidéo] Protection des mineurs : information de l'administration



Le présent projet de loi a pour objet de fixer le cadre dans lequel le ministère public peut ou doit transmettre à des autorités publiques ou des personnes privées exerçant une mission de service public, des informations nominatives à caractère pénal.
Il modifie le code de l’action sociale et des familles, le code du sport et le code de l’éducation, mais de façon plus délicate et à juste titre discutée, le code de procédure pénale.
Le projet de loi prévoit ainsi une obligation ou une possibilité pour les autorités judiciaires d’informer l’administration compétente des procédures mettant en cause une personne placée sous son contrôle et impliquant un contact habituel avec des mineurs, s’il s’agit d’infractions graves, commises contre des mineurs ou de nature sexuelle.
 Il dispose aussi de la possibilité, dans certaines conditions et sous sa seule appréciation, au ministère public d’informer l’administration de procédures mettant en cause une personne dont l’activité professionnelle est placée sous son contrôle.
Il permet enfin de prononcer une interdiction d’exercice d’une activité impliquant un contact habituel avec des mineurs, dans le cadre d’un contrôle judiciaire.
2- Rappelons que ce texte tire les conséquences d’antécédents judiciaires relatifs à l’exercice d’activités professionnelles ou  sociales en contact avec les mineurs. Il vient après le constat dressé dans le cadre d’une mission conjointe de l’inspection générale de l’éducation et de la recherche et de l’inspection générale des services judiciaires, de difficultés réelles dans la transmission des informations entre l’autorité judiciaire et l’éducation nationale, pour la phase précédant le jugement. Les difficultés d’ordre juridiques rendaient aléatoires une information nominative à laquelle naturellement font obstacle la présomption d’innocence et le secret de l’instruction.
Le doyen Carbonier écrivait en 1979- je l’avais déjà cité dans une précédente intervention-  « A peine apercevons-nous le mal que nous exigeons le remède ; qu’un scandale éclate, qu’un accident survienne, qu’un inconvénient se découvre,  la faute en est aux lacunes de la législation ; il n’y a qu’à faire une loi et on l’a fait. ». Nous avons décidé en 2012 de ne pas soumettre le temps législatif au temps médiatique.
3- J’ai hésité, malgré les tragiques évènements, et un moment redouté que nous ne cédions à la satisfaction de papier. Mais la lecture de l’étude d’impact comme l’avis rendu par le Conseil d’Etat me confortent dans l’idée qu’il convenait de venir par la loi encadrer plus avant cette communication d’information judiciaire.
Je le dis avec  d’autant plus de force que très attachée, comme nous tous, à la présomption d’innocence et redoutant de plonger dans le désespoir et le suicide des personnes qui seraient injustement soupçonnées, il me paraissait essentiel que soit menée une réflexion rigoureuse permettant de trouver le juste équilibre entre la nécessaire information que commande une situation critique, les risques encourus, et les garanties constitutionnelle et conventionnelle de la présomption d’innocence, du respect de l’instruction et celui de la vie privée.
La communication d’une information par l’autorité judiciaire après la phase de jugement ne porte pas atteinte à la vie privée et la présomption d’innocence dès lors que la condamnation a été prononcée publiquement. C’est ce que nous dit le Conseil d’Etat dans son avis.
Le plus délicat concerne les stades précédant le jugement. La communication d’une information qui affecte des droits protégés par notre constitution et la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales a suscité de nombreuses interrogations. Celles-ci étaient indispensables et je l’espère, utiles à sécuriser ce texte.
Dans cette situation préalable au jugement, il appartiendra, à l’autorité judiciaire, d’apprécier, de faire le bilan des droits protégeant la personne  et des risques encourus pour la sécurité et l’ordre public en cas de non transmission de l’information.
Il nous appartiendra de contrôler plus tard l’application du dispositif qui est proposé à la Représentation nationale, de mesurer les effets de cette transparence come les conséquences humaines et en droit ( contentieux, QPC).
4- Parti sur des antécédents judiciaires concernant des mineurs, le projet de loi élargit le champ de ces mesures en prenant en compte aussi le public vulnérable. L’article 11-2 dispose d’une information par écrit de décisions énumérées dans ladite loi,  rendues contre une personne employée ou bénévole, lorsque en raison de la nature des faits ou des circonstances de leur commission, cette information est nécessaire pour lui permettre de prendre les mesures utiles.
J’avais à plusieurs reprises manifesté mon attachement à ce que ces mesures ainsi encadrées si elles étaient  mises au service des mineurs, le soient aussi pour des personnes fragiles, les personnes âgées ou celles souffrant d’un handicap, incapables de se défendre. Ces dernières sont quelques fois hébergées ou employées dans des lieux de travail, tels que les ESAT, le travail en établissement et service d’aide  par le  par le travail...
Pour conclure, je rappellerai évidemment  qu’il n’y a pas de risque zéro, que ce projet de loi facilite une information, peut prévenir d’un risque. En tout état de cause, il ne peut exclure la vigilance des autorités administratives ou privées en charge d’un service public, ni leurs responsabilités dans la suite à donner à l’information ainsi transmise par l’autorité judiciaire.

Au regard de l’importance des objectifs poursuivis et du travail d’analyse entrepris, je voterai ce projet de loi. 

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