#Recours au 49.3

Les vertus de la majorité relative n’ont pas été exploitées

Les vertus de la majorité relative n’ont pas été exploitées

Alors que l’Assemblée nationale examinait cette semaine la première partie du projet de loi de finances pour 2023, relative aux ressources de l’Etat, le Gouvernement a décidé de faire usage de l’article 49.3. La Constitution permet en effet au Premier ministre, après délibération du Conseil des ministres, de suspendre les débats à l’Assemblée nationale et de faire directement adopter le texte de loi. En contrepartie, le chef du Gouvernement engage la responsabilité de ce dernier.

Depuis la révision constitutionnelle de 2008, l’usage du 49.3 est limité à un seul texte de loi par session parlementaire, à l’exception des projets de loi de finances (PLF) et de financement de la Sécurité sociale (PLFSS). Le gouvernement va en toute vraisemblance y recourir sur l’ensemble des textes budgétaires, qu’ils concernent les dépenses ou les recettes.

Sans majorité absolue, face au grand nombre d’amendements déposés (3 600, dont près de 1 200 par Les Républicains pour 62 députés, alors que mon groupe, comptant 28 parlementaires, en a présenté 250) et dans la volonté d’éviter les questions sensibles, le Gouvernement a décidé de recourir à ce mécanisme d’exception prévu par nos institutions. Les députés ont saisi la possibilité de répliquer en déposant une motion de censure dans les 24 heures.

Le Gouvernement n’a plus, comme dans le précédent quinquennat, une majorité absolue lui permettant de rejeter facilement les amendements portés par les oppositions de tous bords. Les vertus de la majorité relative, qui implique davantage de débats et nous oblige à des comportements constructifs, tant de la part du pouvoir exécutif que du pouvoir législatif, n’ont pas été exploitées. Alors que le nouveau visage de l’Assemblée nationale constitue une opportunité de travailler différemment, l’exécutif envoie un signal qui n’augure rien de bon pour les mois à venir.

Sur le fond, il est important de tirer les leçons d’une majorité relative qui oblige à des débats plus longs sur des textes majeurs. Le Gouvernement ne peut se targuer d’une approche constructive si l’essentiel n’est pas mis sur la table de la discussion, si la question de l’équilibre et de la justice des efforts consentis par chacun n’est pas traitée. Je veux parler des super-profits et des super-dividendes. Le fossé qui se creuse inéxorablement entre le peuple et les élites mérite mieux qu’un 49.3.

Face à ce constat, le Groupe Socialistes et apparentés a déposé une motion de censure avec les autres formations de gauche. J’ai signé cette motion, qui s’inscrit dans les principes mêmes de la Constitution et rappelle l’importance du débat démocratique à l’Assemblée nationale.

Cécile Untermaier, le 21 octobre 2022.

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