#Semaine de contrôle

Violences intrafamiliales : mes questions au Gouvernement sur son action

Violences intrafamiliales : mes questions au Gouvernement sur son action

Dans le cadre de la semaine de contrôle, lors de laquelle l'Assemblée nationale exerce sa mission de contrôle et d’évaluation des politiques publiques menées par le gouvernement, l'action de l'exécutif relative à la lutte contre les violences intrafamiliales a fait l'objet de débats.

Il était plus particulièrement question de l'application de la loi Pradié (député LR) du 28 décembre 2019.

Mon intervention :

"Monsieur le Ministre,

L'initiative de Monsieur Pradié de vous avoir posé un certain nombre de questions, via un courrier en amont des débats, sur des sujets sur lesquels nous n'avons pas de réponses statistiques, est très intéressante. Pouvons-nous disposer de la copie de votre réponse sur ces points ? 

La méthode ainsi utilisée me parait répondre parfaitement à l'obligation de contrôle parlementaire sur l'application des lois. Elle s'inscrit dans la suite de la mission sur la "concrétisation des lois" que j'ai présidée ces deux dernières années.

Les chiffres relatifs à la lutte contre les violences intrafamiliales ne sont pas satisfaisants. Selon vous, quelle est la mesure absolument indispensable que nous devons prendre très prochainement pour essayer d'améliorer le dispositif de prévention ?"

Le ministre a fait valoir que 80% des affaires ne sont pas portées à la connaissance de la justice, du fait de la difficulté de la remontée de la parole des victimes, et qu'il faut agir davantage sur ce levier.

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Le nombre de féminicides ne baisse pas : 102 femmes tuées en 2020 et 113 en 2021. 3 femmes ont déjà perdu la vie en 2022. Pourtant, l’arsenal législatif s’est considérablement étoffé ces dernières années et la loi Pradié a constitué une grande avancée.

- Cette dernière a entériné la mise en place du bracelet antirapprochement (BAR) qui permet de géolocaliser et ainsi de maintenir à distance les (ex-)conjoints violents, par le déclenchement d’un signal d’alerte activé lors du franchissement d’un périmètre établi par le juge. Le BAR peut être attribué dans un cadre pénal ou lors d'un contrôle judiciaire mais également dans un cadre civil, par le biais d'une ordonnance de protection, sous réserve du consentement du mis en cause.

- Les ordonnances de protection ont été renforcées : la délivrance de ces dernières n'est plus conditionnée au dépôt d'une plainte et elles peuvent être délivrées aux couples qui ne cohabitent pas et n’ont jamais cohabité. Enfin, le juge des affaires familiales dispose désormais d'un délai maximal de 6 jours à compter de la fixation de la date de l’audience pour statuer.

- La loi encourage fortement le recours aux "téléphones grave danger" (TGD), portables dotés d’un système d’alerte relié à un service de téléassistance, qui permet l’intervention des forces de l’ordre dans un délai rapide. Ces dispositifs, généralisés depuis 2014, sont délivrés par les procureurs pour six mois renouvelables à des femmes en situation de grande vulnérabilité. Le texte Pradié a explicité leurs conditions d'attribution et rappelé que les victimes et leurs avocats peuvent en faire la demande et « qu’il puisse être attribué dans les cas de fuite de l’auteur présumé ou de jugement en instance ».

- L'exercice de l'autorité parentale est suspendu de plein droit en cas de condamnation pour crime sur le conjoint, et provisoirement en cas de poursuites, dès la mise en examen. Une suspension automatique du droit d’hébergement et de visite dans le cadre des ordonnances de protection est également prévue.

Mais l’application des outils de prévention contre ces violences est plus lacunaire. Au 25 octobre 2021, seuls 341 bracelets antirapprochement étaient actifs sur les 1000 déployés. Si le taux d’acceptation des ordonnances de protection a le mérite d’être passé de 59% à 67% entre 2017 et 2020, les drames successifs nous interrogent encore sur les moyens effectifs mis en œuvre. Concernant les téléphones graves dangers, 3036 étaient déployés début novembre et seulement 1969 attribués. Ces outils ont pourtant déjà fait leurs preuves par exemple en Espagne, où depuis 2008, année du déploiement des bracelets antirapprochement, aucune femme porteuse d’une balise n’a été tuée. 

Des moyens supplémentaires doivent être alloués à cette cause, avec un accompagnement des victimes quant aux outils de protection existants, et la poursuite du perfectionnement des dispositifs à l'oeuvre. L'Espagne a consacré 1 milliard d'euros à cette cause et réduit d'un tiers les féminicides. 

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