#Comlois

Racisme, antisémitisme et discriminations : renforcement de la sanction pénale

Racisme, antisémitisme et discriminations : renforcement de la sanction pénale

La commission des Lois a examiné cette semaine la proposition de loi visant à renforcer la réponse pénale contre les infractions à caractère raciste ou antisémitisme, alors que ces dernières augmentent très fortement. 

→ L’article 1er donne au tribunal correctionnel la possibilité de décerner un mandat d’arrêt ou de dépôt contre un prévenu condamné à une peine d’emprisonnement pour contestation de crimes contre l’humanité ou apologie de crimes de guerre ou de crimes contre l’humanité

En l’état du droit, cela n'est possible que s’il s’agit d’un délit de droit commun ou d’un délit d’ordre militaire et si la peine prononcée est d’au moins d’une année d’emprisonnement. 

→ L’article 2 transforme en délit les contraventions actuellement prévues en matière de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence, de diffamation, ou d’injure non publique présentant un caractère raciste ou discriminatoire.

Ces injures seraient alors punies de 3750 euros d’amende contre 1500 euros aujourd’hui, avec circonstance aggravante lorsque le délit est commis par une personne dépositaire de l’autorité publique (1 an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende).

Les sanctions en réponse aux injures publiques quant à elles ne sont pas modifiées. Il s’agit aujourd’hui d’un délit puni d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende, avec circonstance aggravante lorsque l’injure est commise par une personne dépositaire de l’autorité publique (3 ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende). 

Intervention 

"Monsieur le Président,

Madame et Monsieur les Rapporteurs,

Mes chers collègues, 

Je ne peux commencer cette intervention sans citer Robert Badinter qui a mené une vie de lutte contre l’antisémitisme, parmi tant d’autres combats que nous lui devons : « Pour notre part, citoyens juifs de France, attachés indéfectiblement aux valeurs de la République, au nom de tous nos martyrs, nous lutterons sans trêve et par tous les moyens que la loi nous donne contre le racisme et l’antisémitisme, cette lèpre de l’humanité, qui demeure toujours et partout, l’expression de la barbarie. »

Il n’est pas besoin d’être juif ou d’appartenir à une communauté pour en défendre les droits. Le principe humaniste prévaut. 

1/ Nous sommes tous d’accord sur le constat inquiétant de la hausse des actes antisémites et racistes. 14 930 plaintes ont été déposées pour ces actes en 2023, soit une augmentation de 18% par rapport à 2022. 129 condamnations pour menaces et 112 pour atteintes aux biens en 2023. Depuis le 7 octobre dernier, 281 affaires ont été signalées à la Cour d’appel de Paris. L’Education nationale enregistre une explosion de ces faits dans les collèges et lycées. Il y a nécessité d’agir.

2/ Le texte proposé ne pose pas de difficulté, sinon une légitime interrogation sur l'efficacité de ce dispositif.

-L’article 1er, qui donne au tribunal correctionnel la possibilité de décerner un mandat d’arrêt ou de dépôt contre un prévenu condamné à une peine d’emprisonnement pour contestation ou apologie de crimes contre l’humanité, risque d’avoir une application limitée. Ce dispositif impliquera l’émission d’un mandat d’arrêt international, les auteurs de telles injures se trouvant majoritairement à l’international. Les Etats tiers pourront refuser de le délivrer, les délits d’opinion étant exclus des mandats d’arrêt internationaux. La qualification des injures publiques en délit d’opinion dépendra de chaque Etat. Mais pour autant, on ne doit pas laisser de trou dans la raquette et je comprends l'intention des rapporteurs.

-L’article 2 transforme en délits les contraventions d’injures racistes ou discriminatoires non publiques. Le dispositif actuel de la contravention a son utilité en ce qu’il porte un effet dissuasif important. Nous n'avons pas prouvé le caractère inefficace de la contravention et je redoute toujours quand on délictualise que l'on aille vers une forme d'impunité car le délit n'est pas prononcé.

3/ Nous avons proposé, par des amendements, la mise en œuvre de la justice restaurative dans le cas d’injures racistes ou discriminatoires publiques et non publiques. La mise en place d’un dialogue entre la victime et l’auteur nous semblait ici prendre toute sa place, en ce qu’elle offre un espace d’échange et de confrontation des points de vue et ressentis.

4/ Aussi, il nous faut responsabiliser davantage les hébergeurs de sites et les réseaux sociaux, qui ont une responsabilité énorme dans la diffusion des injures, en renforçant la veille opérée par Pharos. Le plan national de lutte contre le racisme, l’antisémitisme et les discriminations propose ainsi de créer un guichet unique pour faciliter le traitement des signalements."

Notre amendement créant une obligation de mise en oeuvre de la justice restaurative dans le cas d’injures racistes ou discriminatoires non publiques a été adopté.

A lire aussi