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Les conclusions des Etats généraux de la Justice

Les conclusions des Etats généraux de la Justice
DAMIEN MEYER / AFP

Le comité indépendant des Etats généraux de la Justice, présidé par l’ancien vice-président du Conseil d'Etat, Jean-Marc Sauvé, a remis son rapport au président de la République le 8 juillet dernier.

Les conclusions font état d’une crise majeure de l’institution judiciaire, constat qui n’est pas nouveau, comme en témoignent les magistrats dans une tribune de novembre 2021, et les professionnels et les citoyens lors de l'Atelier législatif citoyen que j'avais organisé en janvier dernier.

La justice n’a plus les moyens de remplir son rôle et fait l’objet de remises en question multiples. Les délais de jugement n’ont cessé de s’allonger au cours des 20 dernières années. L'approche gestionnaire de l'institution ne permet pas de rendre une justice de qualité, avec des décisions exécutées en retard, provoquant ainsi un étiolement du lien de confiance entre la justice et les citoyens. En outre, l’état des établissements pénitentiaires ne permet pas d’assurer une réinsertion de qualité, ni de prévenir la récidive. 

Le comité pointe le sous-investissement chronique de la justice. Malgré des budgets en hausse ces deux dernières années, la France est l'un des pays européens les moins bien classés, d'après la Commission européenne pour l'efficacité de la justice.

Au-delà de cette lacune, les auteurs, très sévères sur la politique judiciaire menée jusqu’à présent, plaident pour une réforme systémique de la justice. Il est dénoncé un déficit de vision, un pilotage déficient et une inflation normative qui impose au juge de s’adapter continuellement à un environnement juridique de plus en plus complexe. La justice n’a cessé de faire l'objet de réformes au cours de ces 30 dernières années, mais celles-ci s'apparentent davantage à des "réformes rustines". 

Plusieurs axes d'amélioration sont proposés dans le rapport pour une véritable réforme systémique :

→ la clarification indispensable du rôle de la justice, et plus particulièrement du juge, dans la société et vis-à-vis des autres acteurs institutionnels.

 → le renforcement de la première instance et un retour de la collégialité avec la mise en place de collaborateurs autour du juge par chambre ou par service afin de limiter la dimension solitaire de l’activité judiciaire.

→ le renforcement urgent des moyens humains et un meilleur pilotage de la gestion des ressources humaines.

→ la refonte de la stratégie numérique et une meilleure prise en compte de cette dernière dans la conception des réformes.

la promotion de la connaissance et l’accès des citoyens au droit et l’ouverture de la justice à la société civile. 

La communication autour du lancement de ces travaux l'an passé contraste avec la discrétion avec laquelle le Gouvernement a pris connaissance des conclusions...

Lors de son discours de politique générale le 6 juillet dernier, la Première ministre a annoncé, d'ores et déjà l'examen d'un projet de loi de programmation de la justice cet automne. Il nous faudra être vigilants quant à la prise en considération par l'exécutif des propositions du rapport.

Ce dernier appelle une nouvelle méthode de la fabrication de la loi, dans laquelle le Parlement doit prendre toute sa place, afin que les professionnels de la justice et les justiciables ne disparaissent pas derrière les projets de loi ponctuels.

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