Intervention en séance publique sur la prorogation de dispositifs de la loi de sécurité intérieure

Intervention en séance publique sur la prorogation de dispositifs de la loi de sécurité intérieure

Monsieur le Président,

Monsieur le Ministre de l'Intérieur,

Madame la Présidente de la Commission des lois,

Mes cher.e.s collègues,

L’Etat d’urgence voté à l’unanimité dans la suite du Congrès de Versailles, comme sa constitutionnalisation alors annoncée par le président de la République, répondait à une situation d’exception, exigeant des mesures de sécurité vitales pour notre pays, ébranlé par le drame terroriste du 13 novembre 2015. Cet état d’exception a été renouvelé à six reprises jusqu’à l’engagement pris par le président Macron, d'y  mettre un terme en novembre 2017. La police administrative de prévention des actes de terrorisme qui avait fait l'objet de longs débats en 2015, a été partiellement maintenue, sous condition d'une évaluation et d'une possible reconduction. C'est l'objet de ce texte tendant à la reconduction de ces dispositions jusqu'au 31 juillet 2021, faute de temps suffisant pour l'examen de cette question sensible.

J'exprimerai un regret et trois observations :

1) Il a été mis fin à l’état d’urgence sans que la question de sa constitutionnalisation ait été traitée, alors que nous savons que la Loi fondamentale constituant notre pacte social, comporte les régimes d’exception. Cette inscription, aurait permis d’inscrire un  contrôle parlementaire de l’Assemblée nationale  et d’éviter le risque de surenchère sécuritaire toujours possible lors de l’ adoption de telles mesures  par temps de crise.

2) Le texte dont la prorogation est demandée, comporte des éléments issus de l’état d’urgence (périmètre de protection, fermeture de lieux de culte, mesures de surveillance dites MICAS et algorithme du renseignement) dont la portée possiblement attentatoire aux libertés, a justifié une clause de revoyure. Nous y sommes. Certes, ces dispositions répondent à la légitime exigence démocratique de prévention du risque terroriste, mais doivent satisfaire tout autant aux règles qui fondent notre Etat de droit. Elles imposent un débat transparent, documenté et apaisé.

3) Force est de constater que la conjoncture actuelle ne permet pas un tel débat au sein d’un parlement soucieux de voter sans attendre les mesures urgentes qui s’imposent, dans une architecture nouvelle mettant en avant la protection de l’environnement. Ce texte a été modifié en Commission des lois et limite à six mois la prorogation, initialement fixée au 31 décembre 2021. Ce délai raisonnable me convient.

4) Ces mesures et leur introduction dans le "dur" de la loi, exigeront de notre part beaucoup d'attention et une évaluation précise de leur application par l'administration. En première analyse, le contrôle parlementaire devra être mis en place de façon élargie à l’ensemble des groupes politiques. Il importe que nous soyons en capacité d'évaluer le rôle de la police administrative et du préfet en ce domaine. "Reculer sur nos libertés, c'est donner raison aux terroristes" disait hier le ministre de la justice, Eric Dupond-Moretti.

Pour l'heure, il s'agit de voter pour ou contre la prorogation de ce texte. Au regard de la situation exceptionnelle que nous vivons, laquelle ne permet pas de procéder à l'examen attentif de ces dispositions, nous voterons pour cette prorogation au 31 juillet 2021.

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