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Rémunération des travailleurs détenus et prise en charge psychiatrique dans l'administration pénitentiaire

Rémunération des travailleurs détenus et prise en charge psychiatrique dans l'administration pénitentiaire

Question n° 15-00055 sur la rémunation des travailleurs détenus - en attente de publication au Journal Officiel 

Cécile Untermaier attire l'attention du ministre de la Justice, garde des Sceaux, sur la rémunération des travailleurs détenus. Le Comité européen des droits sociaux, institution du Conseil de l'Europe chargée de la mise en oeuvre par les États membres de la Charte sociale européenne, laquelle garantit le droit des travailleurs à des conditions de travail et à une rémunération équitables, ainsi qu'aux droits collectifs, a rendu en mars 2023 les conclusions de son examen relatif au respect des droits du travail par la France. Il conclut à la non-conformité de la situation française avec le droit à une rémunération décente pour les personnes détenues. Il s'est fondé pour cela sur les informations fournies par l'Observatoire international des prison (OIP), lesquelles indiquent qu'en dépit de la législation française qui établit des niveaux minimaux de salaire horaire en prison, qui sont indexés sur le SMIC, en fonction des qualifications requises pour accomplir le travail en question, dans la pratique, ces niveaux ne sont pas respectés, principalement en raison de la rémunération à la pièce. Dans ce type de rémunération, interdit depuis 2009, les heures de travail sont comptabilisées sur la base du nombre de pièces produites alors qu'en réalité, le temps de travail effectif du détenu peut être beaucoup plus long et n'est donc pas entièrement rémunéré. Les tribunaux français ont condamné cette pratique et ont confirmé que les détenus en question étaient rémunérés à un taux inférieur à celui établi par l'article D. 432-1 du code de procédure pénale. Selon les rapports annuels de la Direction des affaires juridiques du ministère de la Justice, la majorité des plaintes des détenus portent sur des rémunérations insuffisantes. Ce constat est également partagé par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté. Le Comité européen a ainsi rappelé à l'Etat sa responsabilité dans le contrôle du respect du salaire horaire légal minimum établi pour les prisons. Tout en considérant la politique dernièrement menée pour augmenter le temps de travail proposé aux détenus, elle lui demande de bien vouloir lui indiquer les dispositions prises ou devant l'être pour améliorer une situation ainsi dénoncée.

Question n° 6317 publiée au Journal Officiel le 14/03/2023 sur la prise en charge psychiatrique dans l'administration pénitentiaire 

Mme Cécile Untermaier attire l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur la prise en charge psychiatrique dans l'administration pénitentiaire et sur l'incarcération de détenus présentant des troubles psychiatriques. Alors contrôleuse générale des lieux de privation de liberté, Adeline Hazan déclarait en 2019 que «70 % des personnes détenues avaient au moins un trouble psychologique ou mental et 25 % un trouble psychotique grave ». D'après l'étude « santé mentale en population carcérale sortante », publiée en 2022 « les deux tiers des hommes et les trois quarts des femmes présentent au moins un trouble psychiatrique ou lié à une addiction à leur libération ». Le passage à l'acte suicidaire est six fois plus élevé chez les personnes détenues que dans la population générale, selon l'Observatoire international des prisons. Les agressions entre détenus et celles sur le personnel pénitentiaire sont régulières, à l'instar de celle ayant eu lieu à la prison de Varennes-le-Grand (71) début mars 2023. Une violence qui a entraîné une incapacité de travail d'une durée de 21 jours pour un agent et de trois jours pour deux autres agents pénitentiaires. L'agresseur présentait un « profil totalement déséquilibré depuis plusieurs semaines ». Ces constats et ces incidents interrogent sur deux points, à savoir le développement des maladies mentales en prison et leur prise en charge, ainsi que l'incarcération de personnes dont la place relève de la psychiatrie. Si les experts psychiatres s'accordent à dire que la prison ne crée pas à proprement parler de maladie mentale, elle favorise chez des personnes vulnérables, l'éclosion de pathologies. La gestion des détenus souffrant d'un mal psychiatrique majeur, le danger manifeste comme l'abandon d'un objectif de réinsertion, sont autant de grandes difficultés pour les surveillants pénitentiaires. Ces questions maintes fois posées ne peuvent trouver de solution sans une politique de santé mentale, remettant la prévention et le traitement des maladies psychiatriques au cœur des priorités. La France forme 20 fois moins de psychiatres qu'il y a 15 ans. La spécialité n'attire plus les internes et la répartition sur le territoire fait que des départements sont quasiment privés de ces spécialistes. Il y a déjà une quinzaine d'années, le Comité consultatif national d'éthique (CCNE) s'alarmait quant au déplacement de l'hôpital psychiatrique vers la prison : « l'incarcération de personnes atteintes de maladies mentales graves ne peut qu'entraîner une perte de repères et de sens : perte du sens même de la peine et de l'emprisonnement » mais aussi « perte du sens même du soin et du rôle de soignant ». Aussi, elle lui demande de bien vouloir lui indiquer les mesures que compte prendre le Gouvernement pour d'une part, garantir que l'état de la psychiatrie en France permette de prendre en charge les patients et d'autre part, assurer un meilleur suivi et accompagnement des troubles mentaux en détention.

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