Un Conseil économique, social et environnemental "rénové"

Un Conseil économique, social et environnemental "rénové"

Le projet de loi organique relatif au Conseil économique, social et environnemental (CESE) a été adopté à une large majorité (418 pour et 62 contre), mardi en lecture définitive à l'Assemblée nationale.

Cette assemblée constitutionnelle, composée de représentants sociaux-professionnels, rend des avis et établit des rapports qui peuvent s'inscrire dans le cadre du processus législatif.

Le Parlement, au cours de la "navette parlementaire", a apporté plusieurs modifications à ce texte, déposé en juillet 2020 :

  • la diminution d'un quart des membres du Conseil, de 233 à 175, se traduisant par la suppression de 40 personnalités qualifiées et par la diminution du nombre de représentants pour chacun des secteurs représentés.
  • l'abaissement du seuil de 500 000 à 150 000, à partir duquel les citoyens peuvent saisir le CESE par pétition.
  • l'abaissement de l’âge minimum pour signer les pétitions  saisissant le CESE de 18 à 16 ans.
  • le maintien de la possibilité pour les Français établis hors de France de signer une pétition adressée au CESE.
  • l'ouverture à la consultation citoyenne
  • la création d’une instance et d'un code déontologique au sein de l'institution, dont nous avions porté l'amendement.

 

"Monsieur le Président,

Monsieur le Ministre,

Monsieur le Rapporteur,

Mes cher.e.s Collègues,

Je tiens tout d’abord à saluer le travail du rapporteur. Je tiens également à le remercier sur l’engagement commun qui nous a permis de convaincre le Gouvernement de fixer des règles déontologiques qui s’imposent dans toute institution et prévalent désormais au sein du Conseil économique, social et environnemental. C’est en quelque sorte une norme "iso-déontologie" que  nous avons contribué à mettre en place.

5 observations :

1-Cette réforme se traduit par la diminution d'un quart du nombre de membres de l'institution, qui passe de 233 à 175 membres, engendrant un déficit de représentation de certains acteurs, je pense en particulier, au secteur coopératif et solidaire et au monde universitaire et artistique. Cette décision satisfait des attentes populistes et conforte l’idée néfaste que nous sommes toujours trop nombreux à nous occuper de la chose publique. Une telle réduction n’apporte aucune garantie ni du point de vue de la performance de la réflexion, ni de la qualité de la démocratie. Espérons que la qualité des rapports du CESE puisse être toujours au rendez-vous.

2-Dans le même esprit, il est regrettable qu’ait été maintenue, contre l’avis du Sénat et le nôtre, la disposition prévoyant que la saisine du CESE excluait celle d’autres organismes jusque-là consultés pour avis. Si le CESE a vocation à être le carrefour des consultations, cet objectif aurait dû conduire la majorité à maintenir cette ouverture. Nous, parlementaires, saurons nous adresser à ces organismes ainsi écartés par l’exécutif.

3-L’ouverture du Conseil aux citoyens est un premier pas vers cette démarche participative qui trouve toute sa place dans notre système représentatif. Elle permet l'ouverture au débat public de thématiques clivantes et complexes, elle conforte la légitimité des décisions qui sont prises ensuite par le Parlement, elle favorise des politiques plus inclusives, prenant mieux en compte la diversité, elle nourrit notre réflexion en nous faisant entendre d’autres voix que celles des lobbies, dont on ne méconnait pas l’utilité mais dont on mesure aussi les limites et les obstacles au changement. 

La consultation citoyenne, qu’elle s’illustre dans une convention citoyenne pour le climat ou plus tard peut-être qu’elle traite des déserts médicaux, de la fracture numérique, peut accélérer les décisions et les nourrir. Il ne peut s’agir pour autant, d’un outil au service d’un Gouvernement qui souhaiterait, de manière dangereuse, contourner le Parlement.

4-Plusieurs dispositions sont inspirantes. Je pense notamment à l’abaissement du seuil des pétitions à 150 000 et l’ouverture de ces pétitions dès 16 ans, la possibilité de tirer au sort des citoyens dans le cadre de consultations publiques.

Cette ouverture satisfait celles et ceux qui comme moi militent depuis des années pour que son expression soit sollicitée par tous moyens. Un regret, le rejet de notre proposition d’introduire la possibilité pour une minorité parlementaire de solliciter le Conseil afin qu’il ait recours à une consultation du public.

Rappelons enfin que la parole citoyenne ne peut s’entendre comme être réservée à une seule institution.

5-En conclusion, mon groupe fait le constat que nous sommes loin de l’Assemblée du futur que nous avions envisagée dans la réforme des institutions avec notre ami Claude Bartolone. Si elle a le mérite de s’ouvrir à la parole citoyenne, il est regrettable que cette opportunité ne soit pas saisie pour en faire un meilleur outil de prospective travaillant sur le long terme, au côté du Parlement.

Les regrets ainsi exprimés et faisant application d’une sorte de "théorie du bilan" que nous utilisons en droit administratif, mon groupe votera majoritairement pour cette réforme.

Je vous remercie."

Cécile Untermaier

15 décembre 2020

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