Remise du rapport "Professions du droit, des métiers à adapter au XXIème siècle, un modèle à préserver"

Après trois mois de travaux, quarante-deux auditions, cent cinquante-sept personnes auditionnées, la mission d’information sur les professions juridiques réglementées que je préside, constituée de quinze députés issus de la Commission des Lois de l’Assemblée nationale et représentant tous les groupes politiques, vient de rendre public son rapport.

Celui-ci formule vingt propositions dont la majorité est le fruit d’une réflexion commune avec mon co-rapporteur de l’opposition, et les autres rédigées en concertation avec les membres de la mission issue de la majorité.

Ces propositions s’articulent autour de trois axes :

1°l’accès des jeunes aux professions juridiques réglementées : 

Constatant que les professions juridiques réglementées bénéficiant d’un statut d’officier public et ministériel sont trop hermétiques aux jeunes diplômés, le rapport propose un meilleur accès des jeunes diplômés à ces professions, et ce dans des conditions méritocratiques.
Pour ce faire, nous proposons notamment :

-que l’Autorité de la Concurrence propose une carte des zones « carencées » au Garde des Sceaux qui aura compétence pour arrêter la carte définitive après consultation des représentants des officiers publics ou ministériels concernés. Dans ces zones sera publié la liste des offices à créer et des associations possibles dans les offices existants. Ces offices seront pourvus par le garde des Sceaux, si besoin au terme d’une procédure de sélection objective et impartiale dont les modalités seront à définir.

-que soit substitué à l’examen des greffiers de tribunaux de commerce un véritable concours et l’instauration d’une limite d’âge pour cette profession.

-que la charge d’officier ministériel des avocats aux conseils (et donc leur droit de présentation) soit supprimée en contrepartie d’une indemnisation.  Un barreau spécialisé devant ces Cours Suprêmes sera maintenu afin que soient préservés les liens utiles entre les avocats aux conseils et les juridictions suprêmes. Mais il est nécessaire que seul un concours permette l’accès à cette profession, et ce tant pour augmenter méritocratiquement le nombre de ces avocats dans la limite d’un numerus clausus (par exemple de 240 professionnels, comme le permet le décret du 5 juin 2013).

2°la conservation et l’approfondissement du maillage territorial :

Si les professions juridiques que nous avons étudiées sont globalement présentes dans tout le territoire, il existe des portions de l’hexagone qui ne sont pas pourvues de manière satisfaisante. Ainsi, le maillage territorial doit être complété.

C’est le sens de la proposition relative à la carte des carences pour les officiers ministériels.
C’est aussi dans cette perspective que nous recommandons notamment :

-de conserver pour le moment la postulation territoriale des avocats au niveau des Tribunaux de grande instance, tout en organisant une expérimentation de cette postulation au niveau de deux Cours d’appel.

-de créer un système de péréquation nationale permettant le financement des actes réalisés à perte par les petits offices.

3°la modernisation de ces professions :

Il est nécessaire de poursuivre la modernisation de ces professions, notamment au regard des services rendus aux usagers.

Pour ce faire, nous souhaitons notamment :

-qu’une commission évalue les possibilités de distinguer économiquement et juridiquement le droit de présentation et la « finance » de l’office, et ce pour éventuellement parvenir à une suppression de l’archaïque droit de présentation.

-que les tarifs de ces professions soient plus lisibles, transparents, et correspondent toujours au cout de la prestation réalisée. Pour ce faire, il semble indispensable que la Chancellerie établisse des grilles tarifaires avec l’aide de l’autorité de la concurrence, et que ces grilles soient révisées tous les cinq ans.

-que l’interprofessionnalité d’exercice soit développée (par exemple, regroupement des huissiers de justice, des commissaires-priseurs judiciaires et des mandataires judiciaires au sein d’une profession unique de l’exécution pour offrir aux usagers un service plus lisible et constitué de davantage de prestations).

Les recommandations que nous formulons à l’occasion de cette mission d’information confortent globalement le projet de loi pour l’activité qui sera examiné à l’Assemblée début 2015. Mais les propositions de ce rapport, qui est une véritable banque d’idées, doivent servir pour que la réforme nécessaire de ces propositions soit la plus sereine et la plus juste possible, dans le respect des trois exigences cardinales que j’ai évoquées. 

Je me servirai évidemment de ce rapport en tant que rapporteure spéciale au sein de la commission spéciale pour l'examen du projet de loi relatif à la croissance et à l'activité pour les articles 12 à 22 qui concernent les professions juridiques réglementées).

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