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Projet de loi d'orientation et de programmation pour la justice : audition d'Eric Dupond-Moretti en commission des Lois

Projet de loi d'orientation et de programmation pour la justice : audition d'Eric Dupond-Moretti en commission des Lois

Ce mercredi 14 juin, Eric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, ministre de la justice, était auditionné par la commission des Lois, sur les projets de lois d'orientation et de programmation de la justice. Je suis intervenue en tant que représentante pour mon groupe politique.

I – Efforts à reconnaître sur ces deux textes

A) Nous saluons la majoration des crédits et des effectifs et leur réorganisation

- Augmentation de 60% des moyens budgétaires sur deux quinquennats. 

-10 000 emplois supplémentaires d’ici 2027 dont 1500 magistrats et 1500 greffiers. Nous entendons bien sûr une augmentation nette.  

- Il s’agit d’un véritable texte d’orientation qui accentue ce que nous avions déjà engagé en 2016, avec la création d’une véritable équipe de travail autour du magistrat, et l’ouverture de la magistrature à des professionnels et en interne. 

B) Le texte est solide puisqu’il s’appuie sur les Etats Généraux de la Justice…

-…. à l’instar des conclusions sur la justice commerciale, même si nous n’en partageons pas toujours les préconisations. 

-si le budget est le problème de la justice, c’est aussi le numérique. Il est nécessaire d’améliorer la formation au sein des juridictions et l’articulation des logiciels. 

II- Plusieurs questionnements cependant

A) Trois points manquants 

-D’abord sur la régulation carcérale : indépendamment de votre volonté, nous n’aurons pas les 15 000 places de prison d’ici 2027. La surpopulation carcérale avec 73 000 détenus est très préoccupante, cela a été dit dans les EGJ. Pourtant le PL reste dans une logique carcérale. Le taux de récidive et de réitérants, en lien avec la surpopulation est très important : 42% en 2021. Nous allons vous proposer des dispositions, à la main des magistrats, prises pendant le covid, lesquelles se sont extrêmement bien passées. 

-Il nous faut également développer d’autres solutions : je pense à cette voie parallèle qu’est la justice restaurative. L’exemple du Québec nous montre tout l’intérêt de ce dispositif, en particulier sur les VIF.

-Enfin sur les violences intrafamiliales : il y a urgence. Nous proposons le renforcement de l’ordonnance de protection, s’agissant de sa durée et de sa délivrance. 

B) Sur la procédure pénale et civile

-Je vous avais saisi sur l’enquête préliminaire compte tenu des difficultés de services à respecter le délai de deux ans. Que proposez-vous ici ? Transparency International préconise d’intégrer à la liste des dérogations des enquêtes limitées à 2 ans, l’atteinte à la probité et la fraude fiscale, en plus du terrorisme et des crimes et délits en bande organisée. 

-Sur la géolocalisation à distance : il faut intégrer les journalistes dans le dispositif de protection, eux-mêmes protégés par le secret de l’enquête. 

-Sur les saisies sur rémunération : il faut protéger les plus vulnérables. Nous proposons un ordre d’affectation des sommes.

C) Sur la justice commerciale 

-Nous réintroduirons le magistrat assesseur dans le dispositif des tribunaux des affaires économiques (TAE). On ne peut imaginer une justice commerciale, échappant totalement aux magistrats professionnels. 

-Concernant la contribution économique, il faut néanmoins protéger les moins fortunés, je pense en particulier aux artisans, par un dispositif de forfait qui sera beaucoup plus facile à gérer que ce pourcentage extrêmement compliqué. 

D) Sur l’équipe autour du magistrat 

-Nous devons aller dans cette voie. Mais n’oublions de bien intégrer les greffiers qui attendent d’être revalorisés. 

-Nous devrons également être vigilants quant à la répartition des attachés de justice entre les différentes juridictions. Il est important de conforter le JLD avec la création d’un attaché de justice à ses côtés. 

-La loi, par ailleurs, ne précise pas suffisamment les conditions de diplôme pour accéder à cette fonction d’attaché. Nous devons y remédier.

-Enfin, l’acte juridictionnel doit être sanctuarisé, en excluant les attachés des délibérés. 

III - Enfin, concernant le PLO, plusieurs remarques 

-La restriction de la liberté syndicale des magistrats n’est pas acceptable avec l’amendement du Sénat liant l’impartialité et la liberté syndicale. 

-La transmission des décisions de la commission d’admission des requêtes (CAR) au garde des Sceaux suscite des inquiétudes s’agissant de l’indépendance des magistrats. 

-Enfin, quid de la question de l’indépendance du Parquet, d’une part et de la déontologie des membres du Conseil constitutionnel d’autre part, avec une déclaration d’intérêts et de patrimoine ?  

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