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Projet de loi d'orientation et de programmation de la justice : examen en commission des Lois

Projet de loi d'orientation et de programmation de la justice : examen en commission des Lois

La commission des Lois a examiné cette semaine le projet de loi d’orientation et de programmation de la Justice, sur lequel je suis responsable au nom de mon groupe.      

Ce texte important définit d’une part l’évolution budgétaire du ministère sur les cinq prochaines années et d’autre part, ses orientations en terme de justice pénale, civile, commerciale…

Les efforts budgétaires sont à saluer. Le budget de la justice est en augmentation constante depuis trois ans, passant de 7,6 milliards d'euros en 2020 à 9,6 milliards d'euros en 2023, en augmentation de 26 %. L’objectif de 11 milliards est affiché pour 2027, soit une hausse de 60% en deux quinquennats. Le recrutement de 10 000 emplois est prévu d’ici 2027, dont 1500 magistrats et 1500 greffiers. 

Le texte reprend bon nombre de propositions des Etats généraux de la Justice, consultation menée en 2021 et 2022 sur les besoins de la Justice, mais deux sujets majeurs manquent à l’appel : la régulation carcérale et la lutte contre les violences intrafamiliales. 

D’autres points du texte nous préoccupent également, mentionnés lors de l’audition du garde des Sceaux la semaine dernière et font donc l’objet d’une soixantaine d’amendements que nous avons déposés. 

Sur la simplification de la procédure pénale

Nous serons vigilants lors de la réécriture du code de procédure pénale par le Gouvernement. Il doit être réécrit à droit constant afin d’améliorer sa lisibilité et ne pas être modifié sur le fond.

Les perquisitions de nuit sont élargies très largement. Afin de garantir l’équilibre entre nécessité de l’enquête et respect des droits fondamentaux, nous proposons des amendements renforçant les garanties (présence de l’avocat en perquisition, restriction des critères justifiant la perquisition).

L’activation à distance d’appareils connectés aux fins de géolocalisation et de captation d’images et de sons sera également permise pour certains crimes définis, alors qu’aujourd’hui la géolocalisation et les écoutes sont autorisées via des moyens physiques (dépôt de micro, etc.). Cette possibilité, notamment pour la captation d’images et de sons, pose des questions éthiques en termes de respect des données personnelles et de surveillance généralisée, avec un risque de captation de conversions issues de l’espace public. 

Sur la justice économique 

L’expérimentation des tribunaux des affaires économiques (TAE) en lieu et place des tribunaux de commerce, avec un élargissement des contentieux et des professions concernées ne nous convainc pas. 

Par ailleurs, le texte crée une contribution économique obligatoire pour la partie allant devant le tribunal des affaires économiques afin de financer le fonctionnement de la justice commerciale, remettant en cause le principe de gratuité du service public et d’accès à la justice par tous les justiciables. Nous proposons donc le retrait de cette disposition, ou à tout le moins l’exemption pour les litiges des entreprises de moins de 250 salariés.

Sur l’équipe autour du magistrat

La justice souffrant d’un manque criant de personnels et en particulier de magistrats, le projet de loi renforce l’équipe soutenant le magistrat dans son office et en particulier les attachés de justice. La diversification des profils et la collégialité ainsi proposées sont intéressantes, celles-ci allant dans le sens d’une justice de meilleure qualité. 

Sur le juge des libertés et de la détention (JLD)

Alors que le JLD a vu son office élargi depuis des années aux contentieux relatif à l’entrée et au séjour des étrangers et à celui concernant les soins sans consentement dans le domaine de la santé, le texte recentre le JLD sur la matière pénale en confiant à un magistrat non spécialisé du tribunal judiciaire ces fonctions civiles. 

Sur la procédure de saisie des rémunérations

Alors qu’à ce jour, la saisie sur rémunération est mise en œuvre par le juge de l’exécution, le texte tend à déjudiciariser cette procédure en la confiant au commissaire de justice (huissier). Sagissant de personnes vulnérables, nous devons être vigilants sur le surcoût que pourrait engendrer une telle réforme.

D’autres amendements ont également été déposés, améliorant la régulation carcérale, l’utilisation du numérique, renforçant l’ordonnance de protection (reprise de ma proposition de loi adoptée à l’Assemblée nationale en février dernier), le contrôle des conditions d’incarcération, consolidant les procédures relatives à la justice pénale des mineurs, proposant une revalorisation du statut de greffier, le développement de la justice restaurative, assouplissant la durée de l'enquête préliminaire...

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