Projet de loi de finances pour 2018 : ma lettre aux maires de la circonscription

Projet de loi de finances pour 2018 : ma lettre aux maires de la circonscription

Madame le Maire, Monsieur le Maire,

Au terme du vote en 1ère lecture à l’Assemblée, j’ai souhaité vous faire part de quelques réflexions et vous apporter des informations sur des sujets importants qui vous concernent au premier chef et qui suscitent, fort légitimement, beaucoup d’interrogations.

S’agissant de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, ce texte important vise à fixer sur 5 ans la trajectoire des finances publiques (Etat, sécurité sociale et administrations publiques locales). Alors qu’en 2017 les collectivités regagnent des marges de manœuvre avec une épargne en légère hausse obtenue au prix d’un effort conséquent sur l’évolution des charges de fonctionnement, qu’elles réinvestissent après trois années consécutives de baisse tout en maîtrisant l’encours de leur dette, il ne faudrait pas casser cette reprise.

En ce qui concerne les  ressources des communes et intercommunalités, la DGF sera stable, c’est une bonne nouvelle. Elle sera stable pour les plus grosses collectivités à condition toutefois que celles-ci respectent un contrat les engageant à ne pas augmenter leurs dépenses de fonctionnement de plus de 1,1 % par an. Cette méthode innovante me paraît de qualité.

Si la DGF reste stable, il n’en est pas de même des allocations compensatrices qui devraient subir une lourde ponction. A ce stade, le taux de minoration est de 17 % pour le bloc communal, ce qui est inacceptable. En effet, le gouvernement fait le choix pour la 1ère fois de toucher aux dotations de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP). C’est d’autant plus injuste que les communes qui perçoivent de la DCRTP sont celles qui ont été lésées par la réforme de la TP. A titre d’exemple, la ville de Paris n’en perçoit pas et ne peut donc être ponctionnée. Le combat doit continuer au Sénat, voire en seconde lecture.

A propos de la péréquation, l’enveloppe consacrée à la Dotation de Solidarité Rurale (DSR) et à la Dotation de Solidarité Urbaine (DSU) augmente de 180 millions d’euros, soit deux fois moins qu’en 2017.

Par ailleurs, il me semble important de vous signaler que le nombre de compétences devant être exercées par les EPCI à fiscalité propre pour pouvoir bénéficier d’une bonification de leur dotation d’intercommunalité a été réduite de neuf à huit, à compter du 1er janvier 2018, à la suite de nos multiples demandes en ce sens.

Concernant les fonds d’investissement, je souligne le maintien des crédits DETR au même niveau qu’en 2017, et rappelle que sous la précédente mandature nous sommes passés d’une enveloppe de 615 millions d’euros en 2013, à 996 millions d’euros en 2017. En revanche, la dotation de soutien à l’investissement public (DSIL), créée en 2016 pour un montant de 800 millions, est en baisse significative contrairement aux informations parfois diffusées.

S’agissant de la suppression en 3 ans de la taxe d’habitation pour 80 % des foyers non exonérés, elle met à mal l’autonomie financière des collectivités et accroît leur dépendance vis-à-vis de l’Etat. Tous les élus s’accordent pour dénoncer le caractère injuste de cet impôt en raison des valeurs locatives cadastrales obsolètes. Mais plutôt que de corriger les bases, le gouvernement préfère supprimer la taxe obérant ainsi l’autonomie financière des collectivités. La révision des valeurs locatives des locaux d’habitation était pourtant lancée, pourquoi y avoir renoncé ? Lors de son discours devant les maires, Le Président de la République a confirmé cette suppression pour TOUS : « Si cet impôt est mauvais pour 80 % des citoyens français, il y a peu de chance qu’il soit bon pour les 20 % restants ». Je ne peux qu'approuver cette analyse que j'avais défendue dès le dépôt du projet de loi. J'ajoute que c'est sans doute à raison du risque d'inconstitutionnalité d'une telle mesure que le Gouvernement s'engage enfin à considérer que cet impôt doit être désormais supprimé pour tous. 

Mais si la TH est injuste, les taxes foncières le sont tout autant, l’assiette étant là aussi obsolète. C’est donc une refonte totale de la fiscalité locale qu’il faut lancer. Emmanuel Macron s’y est engagé, je le soutiendrai mais il sera important de conserver un lien avec le territoire comme une autonomie financière aux collectivités.

Au sujet des mesures relatives au logement, vous avez pu lire dans la presse de nombreuses réactions de la part des organismes en charge de l’habitat mais aussi des entreprises du bâtiment. La suppression de l’accès au prêt à taux zéro, à compter de 2020, pour les constructions nouvelles pose problème, l'accession à la propriété restant un objectif partagé par l'ensemble des citoyens. La restriction du dispositif Pinel aux seules zones tendues condamne le péri-urbain. Des investisseurs voulant construire du logement intermédiaire risquent de renoncer à leurs projets. Cette vision privilégie la concentration des populations dans les métropoles et va à l’encontre d’un véritable équilibre du territoire. Par ailleurs, la baisse des loyers pour compenser la baisse des APL versées aux locataires se traduira pour l’OPAC de Saône-et-Loire par une perte de ressource de 10 millions d’euros, autant d’investissements et d’entretien en moins sur nos territoires.

En revanche, il est urgent  de revoir dans son ensemble la politique du logement et son financement, en particulier celle concernant nos ainés pour lesquels on continue à construire des établissements dans lesquels trop de personnes ne pourront accéder sinon en demandant à leurs enfants de participer financièrement. Ce n'est pas ainsi que je conçois une politique soucieuse des générations futures. 

Sur les contrats aidés, je m’insurge sur le supposé clientélisme des élus locaux dénoncé par ce gouvernement. On peut considérer qu’il ne s’agit pas d’une bonne politique pour l’emploi mais avant de la supprimer, on met en place un autre dispositif pour ces publics très éloignés de l’emploi. Sans solution aujourd’hui, ils n’ont d’autre choix que de rejoindre Pôle Emploi ! Quel gâchis humain, sans compter la forme brutale qui a désorganisé les services publics et le monde associatif.

Pour conclure, je veux évoquer le transfert de compétence Eau et Assainissement à l’intercommunalité. Pendant la discussion de la loi NOTRe, je m’étais opposée au transfert obligatoire de cette compétence, sans succès. Une proposition de loi visant à rendre optionnelle la compétence Eau et Assainissement, adoptée au Sénat sous la précédente législature, est arrivée en discussion à l’Assemblée nationale en novembre. J’ai participé aux discussions en commission et en séance. Pour des motifs purement politiciens - le texte émanant du groupe Les Républicains - la majorité l’a rejeté. Le Premier ministre vient de faire des avancées au congrès des maires, je m’en félicite mais que de temps perdu.

Voilà les éléments que je souhaitais porter à votre connaissance. Ce projet de loi de finances stoppe la baisse de la seule DGF et on ne peut que s’en réjouir, d’autres dotations en revanche sont en baisse significative. Au-delà et à ce stade, il porte néanmoins la marque d’une recentralisation qui ne dit pas son nom avec l’introduction de nouvelles normes prudentielles et la réduction de l’autonomie financière des collectivités. Et surtout, il n'apporte aucune solution nouvelle et concrète pour réduire les inégalités entre métropoles et territoires péri-urbains et ruraux.

Restant à votre disposition, je vous prie de croire, Madame le Maire, Monsieur le Maire, à l’assurance de mes salutations très dévouées.

Cécile UNTERMAIER

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