Audition d’Adeline Hazan, Contrôleure générale des lieux de privation de liberté

Audition d’Adeline Hazan, Contrôleure générale des lieux de privation de liberté

Constat partagé sur différents points :

  • La loi Asile et immigration du 10 septembre 2018 « a marqué un nouveau recul du droit des étrangers », notamment par le raccourcissement des délais de recours ou le doublement de la durée de rétention qui est « une mesure aussi lourde qu’inutile ». Le nombre d’enfants enfermés avec leur famille dans les centres de rétention administrative continue de croître ; de 40 en 2013 on est passé à 304 enfants enfermés en 2017. Adeline Hazan dénonce l’absence de courage du gouvernement pour poser une interdiction de principe de la rétention du mineur.
  • Sur la lutte contre la surpopulation carcérale, le rapport fait un constat d’échec. Au 1er décembre 2018, il y avait 71 000 détenus dans les prisons françaises : « un chiffre qui n’avait jamais été atteint dans le passé ». Adeline Hazan estime que la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, malgré quelques mesures positives, comme la généralisation des téléphones muraux en cellule ou l’expérimentation du numérique, « ne permettra pas de véritable politique publique de lutte contre la surpopulation carcérale ». La construction de nouvelles places de prisons est une aberration dès lors qu’elle capte une grande partie du budget, qui ne sera pas consacré à l’entretien du parc existant.

Questions :

  • Sur le droit de vote des détenus : le taux de participation aux dernières élections présidentielles était très faible, de l’ordre de 2% ; dans votre rapport vous dites avoir eu des échanges avec la Ministre de la justice avant la loi de programmation pour la justice ; depuis, la mise en place d’un vote par correspondance a été acté, à titre expérimental ; avez-vous des retours sur l’exercice de ce droit durant les élections européennes ? pensez-vous qu’il faut généraliser le droit de vote par correspondance ou mettre en place de véritables bureaux de vote au sein des établissement pénitentiaires permettant une participation effective aux scrutins comme c’est le cas au Danemark ou en Pologne ? cette solution est-elle envisageable matériellement ?
  • Sur les CEF : vous dénoncez dans votre rapport une situation qui n’est malheureusement pas différente des années précédentes, avec des structures instables, des conditions matérielles inégales, et un suivi éducatif laborieux ; j’ai eu l’occasion moi-même de pointer à plusieurs reprises les problématiques rencontrées dans les CEF, et la question notamment du fort taux de rotation des équipes éducatives et des difficultés de recrutement ; la profession d’éducateur reste en effet peu attractive en raison de situations de violence et de rapports de force quotidiens ; malgré ce constat, la loi de finances pour 2019 prévoit la création de 51 emplois, ce qui me parait tout à fait insuffisant au regard des dysfonctionnements rencontrés ; par ailleurs, pensez-vous que la création de 20 CEF supplémentaires soit une mesure nécessaire et utile ?
  • Sur le téléphone : le téléphone, comme vous le rappelez dans votre rapport, est un élément essentiel du maintien des liens familiaux ; la généralisation des téléphones muraux en cellule prévue par la loi de programmation pour la justice est-elle une mesure suffisante au regard de cet enjeu ?

Consulter le rapport d'activité 2018 de la Contrôleure Générale des lieux de privation de liberté

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