La position du groupe sur le projet de loi "séparatisme"

La position du groupe sur le projet de loi "séparatisme"

La Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi confortant le respect des principes de la République (projet de loi "séparatisme") s'est réunie toute la semaine afin d'étudier article par article les amendements déposés.

Mon intervention sur la position du groupe ⬇

 

"Monsieur le Ministre, Mesdames, Messieurs les rapporteurs, mes chers collègues,

1) C’est un texte qui concerne toutes nos libertés fondamentales et nos droits garantis par la Constitution. Et, pourtant, ce texte comporte une étude d’impact très sommaire qui complique vraiment l’approche objective que nous devons avoir des dispositions projetées, comme le constate d’ailleurs le Conseil d’Etat. Et ce n’est pas le dérisoire exposé des motifs de trois pages qui va éclairer autant qu’il le faudrait, le législateur sur l’intention du Gouvernement. La précipitation continue encore ici avec une procédure accélérée et un temps programmé en séance publique. Plusieurs années ont été nécessaires pour les députés d’alors pour constituer les œuvres législatives que nous revisitons. Ce projet de loi exige une grande attention et une grande prudence pour trouver les bons équilibres. Nous ne sommes pas convaincus que ceux-ci soient trouvés s’agissant en particulier de la liberté d’association et de la liberté de culte.

2) L’effroyable assassinat de Samuel Patty n’est pas hélas le premier crime commis en France au nom d’un fondamentalisme islamiste qui n’est pas la religion musulmane. Il s’inscrit dans un engrenage de barbarie que nous combattons avec le rappel constant que ces actes d’une violence insoutenable, ne devront pas et ne pourront pas avoir raison de nos modes de vie et de nos libertés.

Ainsi, respecter les principes de la République ne se négocie pas, n’entre pas dans un contrat au surplus limité à celles et ceux du monde associatif qui sollicitent une subvention publique. Respecter les principes de la République, ainsi que le prétend ce texte avant tout répressif et défensif, c’est d’abord faire vivre une République indivisible, laïque, démocratique et sociale, une République qui lutte contre les discriminations, organise la mixité sociale à l’école et dans l’habitat, l’égal accès aux soins, à la culture. Rien n’est dit à ce sujet dans ce texte.

3) Notre groupe sera au soutien de certaines dispositions de ce texte, mais nous avons de réels doutes d’une manière générale sur son efficacité et son utilité dans son ensemble. Fallait-il modifier les lois de 1901, 1905 et 1907 ? Fallait-il ajouter des interdictions anecdotiques et caricaturales ?

Fallait-il ajouter des incriminations pénales alors qu’il s’agit désormais de s’interroger, non pas sur le renforcement de la pénalisation, mais sur l’efficacité des infractions dénoncées ; quelles sont les suites données aux dépôts de plainte des victimes, de sorte que celles-ci soient effectivement protégées des violences ou des menaces dont elles font l’objet ?

Dans son avis, le Conseil d’Etat fait appel à la prudence au constat que les libertés d’expression, d’opinion, de culte sont convoquées et que les multiples contraintes nouvelles sont de nature à remettre en question l’équilibre législatif. Il en est par exemple  de l’article 6 et du contrat d’engagement républicain ou des articles 27 et 33… Nous ne soutiendrons pas des contraintes inutiles dès lors qu’elles sont sans effet sur l’idéologie que nous combattons et constituent finalement une intrusion dans une sphère de liberté.

Conclusion : Notre groupe ne veut pas d’un texte instrumentalisant la laïcité avec un objectif de court terme.  Il manque les mesures positives, en miroir des dispositions de contrôle qui font naître le soupçon et l’inquiétude. Et pourtant, ce dont a le plus besoin la République, c’est d’une politique généreuse et constante pour faire vivre ses valeurs. C’est donc à l’aune de cette exigence comme du caractère nécessaire et proportionnel des dispositions qui concernent nos libertés fondamentales que nous examinerons ce texte."

Cécile Untermaier, le 18 janvier 2021

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