Non à l'usage des néonicotinoïdes

Non à l'usage des néonicotinoïdes

Le Gouvernement a déposé un projet de loi relatif aux conditions de mise sur le marché de certains produits phytopharmaceutiques en cas de danger sanitaire, lequel a été examiné en Commission des affaires économiques en septembre et sera discuté en séance publique la semaine prochaine.

Dans son article unique, le Gouvernement a décidé d’accorder une dérogation pour l’usage des néonicotinoïdes jusqu'au 1er juillet 2023, ces pesticides tueurs d’abeilles, interdits depuis 2018, afin de lutter contre le virus de la jaunisse de la betterave. Les députés de la commission ont validé le texte en lui apportant certains garde-fous pour encadrer les dérogations dispensées aux producteurs de betteraves.

Je considère que cette décision va à l'encontre de tous les engagements nationaux et européens pour la biodiversité et la protection de l'environnement.

Mais, surtout, en justifiant la dérogation au nom de la sécurité et de la souveraineté alimentaire, ce gouvernement commet une erreur majeure : celle d’opposer environnement et sécurité alimentaire. Car, c’est bien parce que nous avons trop délégué la sécurité alimentaire européenne aux marchés et aux multinationales que nos producteurs sont en difficulté et que l’on s’en remet au court-termisme de solutions qui n’en sont pas.

Le gouvernement souhaite en effet autoriser dans les champs de betteraves des insecticides néonicotinoïdes, néfastes pour les abeilles. Comme les collègues de mon groupe parlementaire, je m’y oppose :

  • Près de 1 200 études scientifiques existent sur les néonicotinoïdes : leurs effets néfastes sur l’environnement et la santé sont bien connus.
  • La réautorisation des néonicotinoïdes remettrait en cause une avancée écologique importante actée sous le précédent quinquennat.
  • Encore une fois, quelle différence entre les paroles et les actes ! Où est le virage écologique proclamé par le gouvernement ? Que reste-t-il de la convention citoyenne pour le climat ?

En réautorisant les néonicotinoïdes, le Gouvernement fait le choix de la facilité et écarte la question fondamentale du soutien à la filière betterave face à la libéralisation du marché mondial du sucre.

  • Les quotas sucriers de l’UE assuraient aux betteraviers français et européens un prix minimum pour l’écoulement de leur production. La suppression de ces quotas en octobre 2017 a conduit à une chute du prix du sucre, à un effondrement des revenus des betteraviers et à une incitation à toujours produire plus face au dumping de pays comme le Brésil. Le vrai enjeu est donc d’ordre économique.
  • Nous proposons une compensation économique suffisante pour assurer aux betteraviers un revenu décent, le cas échéant, sur plusieurs années. Nous nous appuyons sur l’exemple italien (où a été mis en place un fonds de compensation) pour montrer que des innovations socio-économiques peuvent être mises en place en attendant la généralisation des solutions techniques (c’est-à-dire des alternatives à l’usage des néonicotinoïdes).
  • Nous proposons une nouvelle organisation de la filière pour mieux la protéger face aux dérégulations économiques. Nous voulons renforcer la structuration de la filière, notamment à travers les organisations de producteurs (OP). Aujourd’hui, il n’existe que deux OP dans la filière betteravière : celle de Roye (Somme) et celle d’Etrépagny (Eure). Or, ces regroupements de producteurs permettent de mieux peser dans les discussions en vue de fixer les prix avec les fabricants de sucre.

En réautorisant les néonicotinoïdes, la France perd son statut de leader mondial dans la lutte contre les néonicotinoïdes et freine d’un coup sec le développement et le déploiement des solutions alternatives.

  • Cette crise doit aussi être l’occasion de réengager une vraie politique de réduction de notre dépendance à la phytopharmacie, interrompue depuis plusieurs années. Le Gouvernement a fait du Plan Ecophyto une coquille vide. Le Plan n’est plus piloté au niveau national, les financements n’existent quasiment plus.
  • Alors que l'UE se prépare à la mise en place du Pacte vert européen, avec pour objectif la diminution de moitié des pesticides et la défense de la biodiversité, si le Gouvernement ne remet pas sur les rails la mise en œuvre du plan Ecophyto et qu’il ne revient pas sur les dispositions du PJL néonicotinoïdes, la parole de la France risque d’être décrédibilisée dans ce contexte.
L’email a bien été copié

A lire aussi