Cérémonie organisée par l’Amicale des Diables Bleus des Vals de Saône-et-Loire
Un héros de la Résistance Bressanne : Bernard Morey
Dimanche 1er octobre 2016, à l’occasion d’une manifestation patriotique organisée à Cuiseaux par l’Amicale des « Diables bleus » des Vals de Saône et Loire , à la mémoire des Chasseurs à pied morts pour la France, un hommage particulier a été rendu à un enfant du pays, un héros de la Résistance bressanne : Bernard Morey.
Michel Debost propose de nous éclairer sur l'importance de cette cérémonie et sur la personnalité de Bernard Morey.
Mais qui était vraiment le résistant Bernard Morey ?
Né le 4 avril 1914 à Cuiseaux, Bernard Morey , fils de Jules Morey, le créateur de l’ entreprise locale de salaisons, reçut dans sa jeunesse, de la part de ses parents et notamment de sa mère, grande admiratrice de Jean Jaurès, une éducation qui l’orienta très tôt vers les idées et les valeurs progressistes, qui déterminèrent ses engagements au sein de la SFIO ( le parti socialiste de l’époque), parti auquel il resta fidèle jusqu’en 1968. C’est sur la base de ces valeurs qu’il conduira sa vie, d’abord dans le combat dans la résistance contre les nazis, puis , au retour de la déportation, dans la conduite de l’entreprise familiale, dont il assurera le développement à l’échelle nationale et même internationale, tout en accordant à ses employés un niveau de rémunération et de protection sociale incomparable .
Après avoir « participé » avec un certain désarroi à la « drôle de guerre » suite à son incorporation dans l’armée de l’air en qualité sous-officier mitrailleur sur bombardier, il échappera à la captivité au moment de la débâcle de mai-juin 1940, et, replié à Montpellier, il sera démobilisé le 26 juillet 1940.
De retour à Cuiseaux, il ronge son frein jusqu’à la fin de décembre 1941 où , grâce à un ancien ami étudiant de Lyon, il entre avec le mouvement « Combat » initié par Henri Frenay quelques mois plus tôt , et dès le début de 1942 , en liaison avec d’anciens condisciples élèves du Lycée Rouget de Lisle , il commence à mettre en place les premières structures du mouvement dans la région , en devenant le chef du groupe sédentaire du secteur de Cuiseaux .dans lequel s’engagent plusieurs employés de l’entreprise familiale , avec l’ accord bienveillant de son père Jules Morey. Après quelques mois de préparation, Bernard Morey passe à l’action en organisant le 1er parachutage d’armes tombé en Saône et Loire le 27 octobre 1942 ( quelques jours après l’écrasement de l’avion anglais Montcony) : 36 mitraillettes, 36 revolvers , 36 bombes incendiaires , une ronéo !
Il se chargera ensuite , entre autres d’actions renseignements pour le réseau Gallia de Lyon , en relation avec Londres, et en utilisant le terrain des « Grands Mollards » à Cuiseaux ( Nom de code Chimène) et celui de Cosges-Nance , à l’ouest de Bletterans ( Nom de code Orion) de l’ organisation des atterrissages de radios émetteurs, et des atterrissages ou des départs pour Londres de personnalités de la Résistance, notamment l’atterrissage de Vincent Auriol ( responsable du parti socialiste clandestin et futur président de la République ) qui arrive en Bresse le 17 octobre 1943, et le départ de Raymond et Lucie Aubrac le 8 février 1944, après l’évasion spectaculaire de Raymond organisé par Lucie à Lyon le 21 octobre 1943.
Le 13 avril 1944, le groupe Morey est accroché près de Cuiseaux, après un parachutage d’armes, par une unité de GMR ( Groupes mobiles de réserve , unité paramilitaires crées par Vichy), et deux de ses membres, Rémy Nicot et Daniel Raymond seront arrêtés et déportés . Ils mourront en déportation. S’il échappe ce jour-là à l’arrestation, Bernard Morey est arrêté quelques temps plus tard dans son usine par la Gestapo de Lons le Saunier le 28 avril 1944.
Malgré les tortures, il ne parlera pas, comme en témoigne le fait qu’aucune autre arrestation ne fut réalisée parmi les membres de son groupe, ce qui sera pour lui une source de fierté bien compréhensible, à son retour de déportation . En effet, déporté au camp de Neuengamme, où il arrivera le 7 juin 1944, il résistera pendant un an à l’horreur de l’univers concentrationnaire, dans lequel il retrouvera notamment Henri Solbach, l’instituteur de Serley, arrêté dans son école le 24 mars 1944 , avant d’être enfin libéré le 3 mai 1945.
De retour à Cuiseaux, où on le croyait mort, à la fin du mois de mai, il reprendra progressivement pied dans la vie sociale, au sein de l’entreprise familiale, et au travers de son club de football, ainsi que dans la vie politique locale, où il entamera en octobre 1945 , une longue carrière d’élu local SFIO, d’abord comme conseiller général du canton de 1945 à 1949 , puis maire de Cuiseaux pendant 17 ans …
Michel Debost, membre du Comité Louhannais de l'Association des Anciens Combattants et Amis de la Résistance.