Le mot de la Députée

Le mot de la Députée

L’article 18 de la Constitution permet au Président de la République de « prendre la parole devant le Parlement réuni à cet effet en Congrès ». Dans l’esprit du constituant, cette procédure avait vocation à n'être mise en œuvre que dans des moments particulièrement solennels de la vie de la Nation. Ce fut le cas, sous le précédent quinquennat, lorsque le Président François Hollande s’adressa aux parlementaires quelques jours après les attentats du 13 novembre, pour « rassembler la Nation, dans cette épreuve ». 

 

En revanche, le Président Emmanuel Macron a décidé de réunir le Congrès chaque année, aux fins de faire entendre un discours de politique générale, exposant le bilan de l’année passée et les projets pour l’année future. 

 

Dans cette perspective, que devient le Premier ministre ? Selon la Constitution, le Gouvernement, sous la direction du Premier ministre, « détermine et conduit la politique de la nation », alors que le Président, lui, « assure, par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l’Etat ». Le Congrès, tel qu’envisagé par Emmanuel Macron, efface le Premier ministre, pour en faire un simple subordonné du Président. Qu’advient-il alors de l’équilibre des pouvoirs au sommet de l’exécutif ? 

 

Et que dire du coût de cette intervention ? Si cette procédure devait être réservée à des situations exceptionnelles, c’était aussi à raison de son coût s’élevant à  300 000 à 400 000 euros qui seront prélevés chaque année sur le budget des assemblées. Une téléconférence pourrait suffire à une telle présentation annuelle, s’inscrivant dans la gestion normale du temps du quinquennat. 

 

Par respect pour les institutions et le Président de la République, en tant que Députée, représentante de la Nation, il était de mon devoir d’assister à cette intervention. Et, sur le principe, je considère qu’il est de bonne intention que de vouloir s’adresser aux parlementaires. Mais, le discours était d’abord un discours de mobilisation de la Majorité présidentielle et non un discours de rassemblement. C’est pourquoi, la tenue d’un Congrès dans ces circonstances me parait inappropriée, coûteuse en temps et en fonds publics, de nature à perturber l’équilibre de nos institutions et à banaliser un évènement qui doit rester exceptionnel. 

 

Sur le fond, un bilan a été dressé. Il a convaincu celles et ceux qui l’étaient déjà. L’égalité de destin au cœur de l’Etat providence du XXIème siècle, avec les investisseurs et les chefs d’entreprises au cœur de l’action… a été défendue tout au long du discours. En revanche, la réalité de destins compliqués par le chômage, la maladie, le pouvoir d’achat, n’a pas été évoquée. Comme si dans l’Etat providence du XXIème siècle, cela ne semblait pas possible.

 

Cécile Untermaier

 

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