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Violences intrafamiliales : mon intervention sur le renforcement de l'ordonnance de protection en séance publique

Violences intrafamiliales : mon intervention sur le renforcement de l'ordonnance de protection en séance publique

La proposition de loi visant à allonger la durée de l’ordonnance de protection et à créer l’ordonnance provisoire de protection immédiate, a été débattue cette semaine dans l'hémicycle.

Le texte prévoit :

- d’allonger la durée maximale de l’ordonnance de protection de 6 à 12 mois pour protéger plus longtemps la personne en danger.

- de créer un dispositif nouveau, l’ordonnance provisoire de protection immédiate, pour protéger encore plus rapidement la personne en danger et ses enfants. Le dispositif a vocation à être mobilisé sous 24h lorsque la situation de la personne nécessite la mise en œuvre d’une protection urgente, avant la décision du juge de délivrer l'ordonnance de protection classique dans le délai de six jours.

Cette proposition de loi reprend en partie les dispositions du texte que j'avais déposé, et qui avait été voté à l’unanimité lors de la niche parlementaire de mon groupe en février 2023. Il prévoyait l'allongement de la durée de l'ordonnance de protection de 6 à 12 mois, mais également la suppression de la notion de danger pour ne conserver que celle des violences vraisemblables pour permettre la délivrance des ordonnances de protection.

"Monsieur le Président, 

Madame la ministre, 

Madame la Rapporteure, 

Mes cher.e.s Collègues, 

Permettez-moi de m’associer à ce sentiment de concorde qui nous a habité seulement hier dans le cadre du Congrès et cette inscription historique de l’IVG dans notre Constitution, qui nous fait le premier Etat du monde à porter cette question. Réjouissons-nous de discuter dès le lendemain de ce sujet dans la suite d’un excellent rapport rendu par mon éminente collègue Emilie Chandler. 

Le constat est dramatique, 94 femmes tuées en 2023, une diminution de 20% par rapport à 2022, année qui avait connu une hausse de 15% des victimes de violences conjugales. Près de la moitié des femmes tuées ont été victimes de violences antérieures, de la part de leur compagnon, sans que le bloc police justice ait pu agir. Sur 100 000 femmes victimes chaque année de violences, connues des services de sécurité par le dépôt au moins d’une main courante, 19 000 seulement des auteurs ont été condamnés. 

Les violences subies par les femmes constituent l’une des violations des droits Humains les plus répandues dans le monde. Viols, féminicides, discrimination nous rappellent chaque jour hélas, la réalité de ce fléau. C’est dans cette réalité discriminatoire, que nous venons ici réformer les procédures judiciaires. Le souci de l’efficacité qui passe par l’évaluation au cas par cas de ces drames, doit guider nos travaux.  

1/ L’allongement de la durée maximale de l’ordonnance de protection de 6 à 12 mois, sans obligation de renouveler la procédure avec de nouvelles convocations à 6 mois, est une mesure de bon sens, facilitatrice. Une opportunité que pourra saisir ou non le juge.

2/ Nous avions tous voté un amendement en février 2023 atténuant l’appréciation du danger tant il est délicat pour le juge de le faire.  Les violences vraisemblables suffisent à fonder une ordonnance de protection demandée au juge des affaires familiales. C’est ce que disait d’ailleurs la ministre Aurore Berger lors des QAG de cet après-midi, en disant qu’il fallait simplement écouter la femme et lui dire « je vous crois ». 

Tous les juges que j’ai rencontrés, qui avaient d’ailleurs déjà mis en place des chambres spécialisées sur ces questions, ont confirmé l’analyse faite par le Conseil national de l’ordonnance de protection : la notion de danger vraisemblable complexifie la décision à rendre par le juge qui se refuse à opérer une hiérarchisation dans les violences, en distinguant celles qui sont sources de danger de celles qui n’en sont pas. 

Les violences vraisemblables fondent une ordonnance de protection demandée par une victime. Rappelons qu’il s’agit d’une mesure de protection et non une décision de culpabilité.  L’enquête vaste et sérieuse menée par une magistrate sur les obstacles aux ordonnances de protection, enquête commandée par le comité national de l’ordonnance de protection, identifie cette difficulté et conclut à cette nécessité.  Le comité a été mis en place pour nourrir notre réflexion. La présidente Ernestine Ronai, à qui l’on doit l’idée du téléphone grave danger, né au tribunal de Bobigny, doit être écoutée et l’amendement que nous avions voté à l’unanimité, doit être adopté à nouveau, avec votre soutien, monsieur le ministre. 

3/La création d’une ordonnance provisoire de protection immédiate délivrée sous 24h, est un outil pragmatique. Les procureurs prennent régulièrement des mesures de protection en mettant le conjoint violent à l’écart, dans le cadre d’une garde à vue par exemple. L’ordonnance de protection de 24 heures a tout son sens. 

Au tribunal judiciaire de Chalon-sur-Saône, il manque des juges et les retards dans les affaires civiles sont considérables. La lutte contre les Violences faites aux femmes est directement liée à la capacité des magistrats de se saisir rapidement de ces dossiers. Aidons les dans leur difficile mission de juger. C’est le sens de cette intervention qui conclut par le vote favorable de mon groupe à cette proposition de loi. 

Je vous remercie. "

Le texte a été adopté et sera désormais examiné au Sénat.

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